Critique de Dancers, un documentaire réalisé par Kenneth Elvebakk. Cette danse avec le modernisme tient-elle toute ses promesses ? Notre avis dans cet article.
Kenneth Elvebakk, réalisateur norvégien habitué aux joutes contre les clichés, nous revient avec Dancers, un documentaire étonnant sur le monde de la danse, et la pratique masculine de celle-ci, victime de clichés....
Une première danse.
Dancers raconte l'histoire de trois amis d'enfance : Syvert, Lukas et Torgeir. Ce trio inséparable, est grâce à un rêve qu'ils ont en commun : percer dans l'univers de la danse, en intégrant l'académie de ballet d'Oslo pour devenir danseurs étoiles. Seulement, les sélections sont d'une difficulté inouïe, et les possibilités d'incorporer cette école renommée sont rares. C'est ainsi que les trois amis vont devoir redoubler d'effort, se faire souffrir d'une manière exceptionnelle. Kenneth Elvebakk, le réalisateur de Dancers, nous ouvre les portes du quotidien de ces jeunes athlètes, nous fait vivre l'âpreté des entraînements, l'angoisse lors des auditions, et tout ce que leur motivation va leur permettre de réussir.
Là où Kenneth Elvebakk passe, les clichés trépassent.
Dancers prend corps dans le milieu de la danse, mais aurait très bien pu nous parler de golf, ou de handball, du moins quand on observe le fond proposé par son réalisateur. Kenneth Elvebakk prend appui sur la danse pour pouvoir décortiquer, comme à son habitude, les innombrables clichés liés à la pratique d'un sport par une personne homosexuelle. Que ce soit dit, rien ne nous ramène à une question de sexualité. Kenneth Elvebakk est trop intelligent pour tomber dans le panneau. Dancers est l'occasion rêvée de démontrer que la virilité n'est en aucun cas liée à une attirance, ni même au rendu visuel d'un sport et de ses pratiquants.
Un sacrifice constant.
Pour ce faire, Dancers suit ses trois sujets au plus près de leurs parcours, jusque dans les coulisses des ballets, qui vous surprendront tant on est loin du glamour qu'on peut s'imaginer. On se rend compte que la recherche de la perfection en tous points induit inévitablement des décharges d'énergie difficilement soutenables pour un être humain. Un véritable sens du sacrifice se développe alors chez les sportifs de Dancers, avec des plans pris sur le vif et d'une rare intensité. La beauté de la pratique dansante est bien rendue, tout ce qui touche au rendu visuel nous convainc , même si on note deux ou trois problèmes d'image sous-exposée.
Humaniste et progressiste.
Comme annoncé plus haut, Dancers est pourtant loin d'être un unique documentaire sur la danse. Kenneth Elvebakk se concentre surtout sur le rapport entre ce sport, sa pratique (toute aussi conventionnelle qu'elle soit, les hommes dansant depuis toujours), et sa réception par le public. C'est ainsi qu'on tisse des liens avec les sujets, qui deviennent de véritables personnages pour ce qui devient, au fur et à mesure, une fable humaniste plus qu'un reportage sportif. On voit ces jeunes gens souffrir, se donner à fond, mais aussi être soutenus par leurs familles. Des hauts et des bas liés à la pression, au caractère chronophage de cette pratique, mais aussi une sorte d'agressivité dans l'envie de prouver. Dancers montre non seulement des danseurs doués, mais aussi des êtres humains dont le but est supérieur à la simple réussite formelle : par eux, et au fond ils le savent, c'est toute une batterie de poncifs qui vont voltiger hors de nos esprits, parfois manipulés par des idées reçues pas si sempiternelles...
Danse vers les étoiles.
Dancers est un documentaire attachant, qu'on aurait tout de même aimé meilleur au montage. La forme chronologique est une évidence, mais le déséquilibre se fait sentir dans le choix de donner du temps à l'image. Ainsi, le très talentueux et jusqu'au-boutiste Lukas vampirise un peu la caméra de Kenneth Elvebakk, qui en oublie son fil conducteur sur quelques minutes. Rien de bien grave bien heureusement, et il serait injuste d'en tenir rigueur plus que de raison à ce Dancers, qui mérite les quelques récompenses lui étant attribuées, dont celle du meilleur reportage au Festival of Films on Art de Montréal.
Dancers, les bonus.
Découvrez la bande annonce de Dancers.
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