Les innovations se multiplient ces derniers temps pour faire en sorte que les déficients visuels aient accès à l’industrie du divertissement. Mais les projets poursuivent bien souvent un autre objectif.
On savait déjà les nouvelles technologies friandes d’innovations pour aider les aveugles à se déplacer ou à mieux appréhender le monde. Mais, une fois ces besoins vitaux accomplis, il est un autre domaine que les technologies essayent désormais de rendre accessible : le divertissement. Dernier projet en date avec cet objectif : A Blind Legend. Initiative d’une start-up lyonnaise, Dowino, présentée lors du Salon santé autonomie de Paris, le jeu mobile est entièrement conçu sans image ni indications visuelles. À la place, des signaux sonores transcrivent l’ambiance et le déroulé de l’action. C’est en fait la technologie du son « binaural » en trois dimensions qui a été utilisé par les créateurs du jeu.
Le jeu vidéo, désomais accessible aux malvoyantsCe n’est pas la première fois qu’un jeu vidéo est accessible aux déficients visuels. En revanche c’est la première fois qu’un studio conçoit entièrement le jeu sans image. Le pitch ? Le chevalier Edward Blake s’est fait crever les yeux par son ennemi et doit désormais retrouver sa dame enlevée. Comme son héros, le joueur n’a donc plus accès à la vision. Ce sont ensuite ses gestes tactiles sur smartphone qui permettent de réagir.
Film, photo, jeu, de nouveaux mondes accessibles grâce aux start-up
A Blind Legend correspond donc à un nouvel élan de l’innovation dans le domaine de la malvoyance : intégrer aussi le divertissement. Mais à chaque fois, l’initiative vient plutôt d’individus ou de start-up, rarement des studios établis. « Les éditeurs traditionnels s’intéressent très peu au sujet car ils considèrent ce marché comme une niche et non comme une opportunité d’élargir leur public. » nous explique Pierre-Alain Gagne cofondateur de Dowino. Ainsi grâce aux appareils photos intelligents, le photojournaliste Bob Lee avait réussi à enseigner l’art de la photographie aux déficients visuels.
Bob Lee veut aider les déficients visuels à faire de la photographie.La start-up EnChroma, quant à elle, a mis au point des lunettes permettant aux daltoniens de percevoir les couleurs « réelles ». D’autres encore ont mis en place de salles de cinéma entièrement repensées pour l’audiodescription. Un peu dans l’esprit du Festival du film malvoyant de Paris en mai dernier. Dans tous ces projets, des start-up, associations ou des équipes de chercheurs utilisent les technologies pour rendre de nouveaux domaines accessibles aux personnes malvoyantes mais le but n’est pas uniquement là.
Des outils pour sensibiliser aussi
L’idée sous-jacente est aussi de sensibiliser les autres. Le jeu vidéo « sans les yeux » de Dowino a aussi dans le viseur le grand public à la fois pour délivrer une « expérience sensorielle » différente et pour faire comprendre ce qu’est la situation des malvoyants et leur quotidien. Mais l’idée est aussi de proposer une nouvelle expérience : « Les gamers traditionnels sont à la recherche d’expériences de jeu inédites et innovantes, étant donné que l’industrie a tendance à “aseptiser” l’offre et à recycler des jeux à succès. » selon Pierre-Alain Gagne. Le jeu vidéo pour malvoyant serait-il donc l’avenir de l’industrie ? Toujours est-il que Dowino vise désormais un autre domaine : le tourisme avec des visites virtuelles audio après la sortie en septembre 2015 de A Blind Legend