Je n’ai aucune formation ni aucun talent pour cela, mais il n’est pas exclus qu’un jour l’envie me prenne de devenir artiste.
Poète? Pourquoi pas? Chacun de nous est un peu poète “à l’insu de son plein gré”, n’Est-ce-pas?
Ou peintre? Ce serait bien! Un de mes anciens collègues a découvert la peinture une fois à la retraite : il a pris des cours, il s’est payé tout un attirail et il s’éclate devant son chevalet Je crois savoir qu’il arrondit ses fins de mois en vendant ses toiles.
Sculpteur? J’ai toujours été en admiration devant les statues en marbre blanc : que de travail, que de talent, que de patience!
Romancier? Non, c’est trop compliqué : il faut une sacrée imagination, une connaissance parfaite de la langue choisie, une organisation particulière avec des fiches, des prises de notes, des dossiers….
Musicien? Là, je peux assurer que j’y ai renoncé il y plus d’un demi-siècle : j’avais eu l’occasion de devenir bassiste dans un groupe et je n’ai pas franchi le pas! Timidité, manque de confiance en soi, connaissance intime de mes limites? En tous cas, je ne ressens plus cela que comme un léger petit regret.
Acteur? Quand on vu à 15 ans Gérard Philippe jouer “Le Cid” ou quand plus tard, on a applaudi Tayeb Seddiki dans ses œuvres, devenir acteur de théâtre peut créer des vocations. Mais la vraie vie est bien loin des vocations : il ne me reste en tête que quelques vers de la tragédie de Corneille et quelques images de l’ascète Abderrahmane Al Majdoub!
Alors, cinéaste?
Oui, pourquoi pas!
Demain donc, je deviens cinéaste! Réalisateur de films!
Il y en a à la pelle, des bons, des moyens, des nuls, des excellents, des doués, des grandes gueules, des conformistes, des avant-gardistes, des spécialistes de ceci ou de cela!
Si demain, j’ai un projet cinématographie et qu’un producteur fou me fait confiance, je deviendrais cinéaste!
Et cela ne regardera personne, à part d’un côté mon producteur qui aura mis ses sous sur mon projet en espérant les rentabiliser et de l’autre les spectateurs qui auront payé leurs tickets pour voir mon film et les critiques dont c’est le travail.
Toute personne qui parlera, en bien ou en mal, de mon film par simple ouï-dire et sans l’avoir vu, se comportera en zélateur irresponsable ou en censeur indigne.
Je pourrais tenir le même raisonnement toutes les œuvres relevant de la création artistique!
Ostraciser un roman dont on aurait lu quelques pages ou qui aurait fait l’objet d’une cabale dirigée par tel ou tel courant de pensée, relève du même comportement liberticide et surtout anesthésiant.
Pointer d’un doigt accusateur un acteur ou une actrice ayant accepté de tenir un rôle qui pourrait choquer la vertu souvent hypocrite ou la sensibilité parfois surjouée de certains s’inscrit dans le même registre de pensée!
Notre culture, encore empreinte d’oralité, accepte le phénomène de reproduction de ce que nous recevons : nous sommes très à l’aise dans la transmission des messages, sans prendre la peine d’en vérifier la teneur.
Les réseaux sociaux participent à l’encrage de cette tradition!
Dés qu’une page Face Book est ouverte, il faut que l’on y adhère, par peur de ne pas faire partie du groupe : en refusant de nous distinguer, nous adhérons bêtement à la meute.
Alors, mesdames messieurs, si l’envie me prenait de devenir artiste, je vous demanderais de lire mes œuvres, de les regarder, de les voir, de les toucher, avant de donner votre avis!
Si elles ne vous plaisent pas, libre à vous de le dire : mais ayez l’honnêteté morale et intellectuelle de les affronter avant de les juger, de les accepter, de les jeter aux orties ou de les encenser!
Mais rassurons-nous, je ne serai jamais artiste et beaucoup d’entre vous ne seront jamais des critiques d’art crédibles.
Laissons les vrais artistes faire leur métier, il n’est pas aisé et gardons-nous de les juger et surtout de les condamner à mort!
Ce n’est ni intelligent ni moral ni citoyen ni légal !