Alléluia // De Fabrice du Welz. Avec Laurent Lucas et Lola Duenas.
Présenté à la Quinzaine des Réalisateurs du Festival de Cannes 2014, Alléluia est un film très étrange, tant par son histoire que par sa forme. Mais c’est aussi peut-être ce qui lui permet de se démarquer des autres. A mi chemin entre le film d’horreur et le thriller psychologique, rapidement l’histoire installe une ambiance que Fabrice du Welz maîtrise du début à la fin. Le fait que ce film soit difficilement descriptible est probablement son plus bel atout. On ne sait pas du tout ce que l’on va voir et rapidement, on se nourrit de ce que Alléluia tente de nous raconter. Malgré la complexité de la compréhension, le récit reste assez simple. C’est la narration qui est finalement plus complexe que les autres et qui tente d’apporter un peu de nouveauté dans le cinéma français. Celui à qui l’on doit le très médiocre Colt 45 (un des films les plus chers de 2014 pour le cinéma français) a sorti un deuxième film la même année mais beaucoup plus confidentiel. Il revient donc ici à ses premiers amours, entre Vinyan (dont je garde un mauvais souvenir) et le plutôt correct Calvaire (sans pour autant en garder un excellent souvenir là aussi). Son retour au scénario est une occasion en or afin de faire ce qu’il préfère.
Lorsque Gloria accepte de rencontrer Michel, contacté par petite annonce, rien ne laisse présager la passion destructrice et meurtrière qui naîtra de leur amour fou...
Le cinéma inclassable est généralement ce que je préfère, surtout qu’en France on est capable d’avoir notre propre cinéma indépendant dont Alléluia fait clairement partie. C’est un petit film, presque artisanal. Cela se ressent dans le grain du film qui change de ce que l’on a pour habitude de voir. Le travaille que Fabrice du Welz fait sur l’image de son film est tout simplement renversant. On retrouve donc beaucoup d’éléments qui ont fait aussi le succès de Calvaire mais en démontrant qu’il a tout de même grandi depuis son premier long métrage. Les images sont fortes, puissantes, et parviennent à chaque fois à créer une vraie surprise. C’est ce qui permet aussi de voir Alléluia comme un film brut (et brutal aussi car il n’a pas peur de montrer des scènes sanglantes, où l’on découpe des corps, etc.). C’est peut-être là aussi où Alléluia pèche un peu dans le sens où comme Calvaire, il souffre parfois de son excès. Heureusement pour nous que le scénario équilibre le tout avec cette histoire d’amour pas comme les autres. Gloria et Michel sont des gens capables de tout, surtout de tuer et de s’auto-détruire à leur façon. Jusqu’au bout le film veut créer une tension permanente, qui ne nous lâche jamais.
La mise en scène de Alléluia est forcément ce qu’il y a de plus intéressant. On comprend donc que le film ait mis l’accent sur l’image et ait été sélectionné dans la sélection de la Quinzaine des Réalisateurs. Car Fabrice du Welz, qui peut aussi bien séduire que décevoir est un réalisateur qui peut déplaire et je peux le comprendre. Le côté glauque du scénario est renforcé par une mise en scène au poil, le choix de ce grain granuleux qui change légèrement la perception que l’on peut avoir de ce film, lui donnant une allure old-school d’un film maison retrouvé dans un grenier après des années. C’est aussi une vraie romance dramatique comme on ne voit peu au cinéma. Il est rare de voir des films aussi dramatique d’un point de vue de ce qu’ils peuvent raconter en termes de romance. Alléluia est un film de genre, d’auteur, qui mériterait d’être vu rien que parce qu’il tente de bousculer un peu les codes. Ce n’est pas la première fois que l’on voit un film qui tente d’être original avec un angle visuel de ce genre mais avec un tel scénario, c’est rare. Dommage cependant que le film mette du temps à s’installer et que le milieu soit parfois light dans sa façon de gérer la relation entre les deux personnages.
Note : 7/10. En bref, un thriller psychologique étonnant.
Date de sortie : 26 novembre 2014