Dans son projet de loi sur le dialogue social, le ministre du travail François Rebsamen propose la suppression de deux articles de loi précisant une obligation majeure en faveur de l’égalité professionnelle : la publication annuelle d’un rapport de situation comparée.
Ce projet de loi a créé une véritable polémique, matérialisée par une pétition en ligne et un site web, lancés le lundi 11 mai par l’ancienne ministre des Droits de la Femme Yvette Roudy, soutenue par plusieurs associations féministes. La pétition a rapidement recueilli plus de 35000 signatures.
Devant l’ampleur des protestations, le gouvernement a annoncé sa volonté d’amender ce projet de loi.
La situation s’est donc -pour le moment- apaisée (site et pétition ne sont d’ailleurs plus en ligne), mais il est intéressant de comprendre pourquoi ce projet de loi a suscité tant de passion. Pour cela, il faut rappeler ce qu’est le rapport de situation comparée (RSC) : instauré par la loi du 13 juillet 1983 et obligatoire pour les entreprises de plus de 50 salariés, ce rapport permet (comme son nom l’indique) de comparer la situation des hommes et femmes dans l’entreprise (embauche, formation, promotion professionnelle, qualification, classification, conditions de travail et rémunération effective), afin de mettre en avant les éventuelles inégalités et prendre les mesures nécessaires. Le rapport de situation comparée a donc trois objectifs :
- mesurer les inégalités entre les hommes et femmes, grâce à l’analyse d’indicateurs chiffrés
- comprendre les causes de ces inégalités
- agir pour réduire ces inégalités
Ces deux derniers points font le réel intérêt du RSC : il permet d’aller au delà de la seule analyse chiffrée, et d’agir efficacement sur les causes réelles des inégalités.
Cette loi a été renforcée en 2012 par un décret d’application, précisant les pénalités financières applicables pour les entreprises ne répondant pas à ces exigences.
Le rapport de situation comparée est donc un outil concret permettant d’œuvrer pour l’égalité professionnelle. Un projet de loi visant à sa suppression serait un grand retour en arrière, et enverrait un message alarmant, traduit par Yvette Roudy en ces mots : « L’égalité ? C’est réglé. Circulez, il n’y a rien à voir. »
François Rebsamen va donc devoir revoir son projet de loi, en sachant cette fois que personnalités et associations veillent à ce que l’égalité professionnelle reste un enjeu majeur.
Ce fiasco aura au moins servi à faire parler du rapport de situation comparée. Affaire à suivre…