De Stéphanie Hochetj’avais lu son excellent essai L’éloge du chat, un essai dans lequel elle nous apportait une réflexion intelligente et qui nous fait voir d'un autre œil ces félidés.
Mais Stéphanie Hochet est avant d’être une essayiste une romancière et passionnée par l’Angleterre, où elle a résidé à plusieurs reprises. Et c’est assez naturellement que pour son tout nouveau roman qui vient de sortir chez Rivages, elle tente de s’essayer, comme le titre du roman en question l’indique, à un roman anglais.
Le titre est assez ambitieux puisqu’il porte le projet de l’auteur, celui de retrouver l’esprit et l’atmosphère des romans anglais de la fin du 19 ème siècle début du 20 ème siècle, ceux de Virginia Wolf ou Jane Austen, qu'on a coutume de classer sur la catégorie des "romans victoriens".
« Un roman anglais « nous immerge ainsi en moins de 200 ans pages au sein d'une famille de la bourgeoisie anglaise du début du xx ème siècle.
L’ambiance qui régnait en Angleterre pendant la Première Guerre mondiale est formidablement retranscrit par la plume à la fois distanciée et sensible de l’auteur, qui nous offre également un beau portrait de femme et un roman sur la maternité à travers l’héroïne de l’histoire, une certaine voit Anna Whig ( visiblement inspirée de la vie de Virginia Woolf, si on en croit la phrase d’ouverture).
Anna Whig est en fait une bourgeoise lettrée du Sussex, mère d’un petit garçon de deux ans, Jack, persuader son mari Edward d’embaucher par petite annonce une garde d’enfant prénommé George et dont elle va apprendre, contrairement à ses premières pensées (Quand je découvris son prénom, mon imagination s'emballa. Je repensais à l'auteur de La Gitane espagnole, Félix Holt et Middlemarch. Elle s'appelait George. Comme George Eliot") que George n’est pas une jeune femme, et qu’en plus ce jeune garçon ne va pas la laisser indifférent.
Un étranger qui vient faire craqueler le beau vernis d’une famille bourgeoise, on pense aussi un peu au Théorème de Pasolini, mais en version bien plus british, avec l’élégance et la pudeur qui caractérise ce style.
On a l’impression que l’auteur a vécu au sein de ces famille britannique conventionnelle du début du XXième siècle où les non dits et les concessions sont de mise pour toujours garder une harmonie, du moins en surface ( J’ai essayé de ne pas fixer la mine contrariée de mon mari, ce qui n’allait pas de soi, mais je viens d’un milieu bourgeois : je suis parfaitement capable d’ignorer la présence d’un éléphant dans un salon. »)
Par son écriture précise et subtile, la romancière française parvient à esquisser un bien beau portait de femme tourmentée et de le placer dans cette société de l’époque, où les femmes avaient tendance à remplacer ces hommes partis au combat (ce qui n’est pas le cas des deux hommes du roman, dispensés de guerre pour deux raisons différentes).
Bref, un très joli roman, peut—être un poil trop bref pour qu’on s’attache encore plus aux personnages, mais qui montre une nouvelle fois l’immense talent de cet auteur.