Permettre au grand public de financer des innovations en matière de santé qui pourront changer leur vie ou celle de leur entourage, telle est la vocation de la plateforme de financement participatif Wellfundr.
Entretien avec Fabrice Nabet, fondateur de la plateforme de crowdfunding dédiée à la santé, Wellfundr, à l’occasion du salon Health 2.02015.
L’Atelier : Qu’est ce que qui a motivé la création une plateforme de crowdfunding dédiée à la santé?
Fabrice Nabet : À l’origine, j’ai toujours baigné dans l’univers du digital car auparavant je travaillais chez Publicis, avant d’intégrer la start-up Betterise, chaperonnée par Michel Cymès. J’ai ensuite créé mon agence de conseil en investissement participatif, qui a ensuite abouti au lancement de la plateforme Wellfundr en avril2014. C’est après avoir côtoyé le milieu de la santé que j’ai pu en observer les travers : nombre d’acteurs proposaient des projets santé manquant de sérieux et qui n’étaient pas non plus sélectionné avec suffisamment de rigueur par ceux dont c’était la mission.
La plateforme s’adresse à tous type de publics: que ce soit des start-up, des associations ou encore des étudiants souhaitant financer un voyage d’étude lié à la santé, ou encore des professionnels du domaine qui souhaiteraient financer du matériel médical. Et dès septembre prochain, nous nous adresserons également aux acteurs du domaine de la biotechnologie et de la medtech, puisque nous lanceront de la version «crowdequity» de notre plateforme.
C'est pour cette raison que bien que nous ayons reçu plus de 80propositions depuis le lancement de la plateforme, seulement une quinzaine ont été mis en ligne sur Wellfundr. Celles-ci sont en effet soumises à la validation de notre réseau de scientifiques et de médecins et certains ont été rejetées pour des raisons scientifiques, mais aussi pour des raisons éthiques (projets d’étude de clonage humain, arnaques).
Ce genre de plateforme couplée à la diversification et à la multiplication d’applications médicales n’entraineraient-elles d'ailleurs pas un risque de démocratisation des soins à des non-spécialistes?
Il est en effet nécessaire de mettre des limites à la technologie. Il faut rappeler qu’aucune technologie ne remplacera un médecin et qu’aucune application ne remplacera un vrai dépistage. Seul le médecin peut agir directement sur la prévention et sur le soin.
« Il faut rappeler qu’aucune technologie ne remplacera un médecin et qu’aucune application ne remplacera un vrai dépistage. »
Néanmoins, la technologie à la capacité de venir en aide à ces professionnels lorsqu’elle est bien utilisée. Aujourd’hui, la prise de décision est ultra-complexifiée pour les médecins, et la technologie peut contribuer à faciliter ces prises de décision.
On aurait tendance à penser que le financement de tels projets est à l’origine de grandes institutions comme des laboratoires ou des universités, quel rôle ont-elles dans les initiatives de financement participatif?
Le crowdfunding est un vrai métier qui nécessite un accompagnement. Les grandes institutions manquent souvent de compétences en la matière et le crowdfunding vient compléter un besoin qu’elles ne peuvent pas couvrir. En tant que plateforme de financement participatif, nous nous ne positionnons pas en tant que concurrents, mais plutôt dans une optique de collaboration. L’idéal serait de s’associer à ces grands acteurs qui investissent massivement dans la santé afin de simplifier leurs démarches, et d’apporter à notre plateforme une certaine légitimité.
« Il devient nécessaire de démocratiser les projets santé au grand public, car il est directement concerné. »
Le crowdfunding permet aussi de répondre à un défi de la société : il y a des énormes attentes de la part de la population. Il devient donc nécessaire de démocratiser les projets santé au grand public, car il est directement concerné.
Est-ce que, selon vous, l’état du financement participatif en France est propice à ce genre d'initiatives?
En France, le crowdfunding en est encore à ses balbutiements, notamment en matière de santé. Beaucoup de projets éprouvent encore beaucoup de difficulté à se faire accompagner. Le blocage de la France quant au crowdfunding est principalement culturel. La relation qu’à la société française avec l’argent n’est pas du tout la même que dans les pays anglo-saxons par exemple. Pour preuve, l’anonymat d’une majorité de dons effectués sur notre plateforme depuis la France, preuve qu’il reste encore difficile de parler du fait que l’on finance un projet. Néanmoins, l’ouverture se fait peu à peu en France. Le crowdfunding est avant tout une relation de confiance, et celle-ci est en train de s’établir petit à petit.
La preuve est que dès la sortie de la plateforme, les deux premiers projets mis en ligne ont été un succès, à hauteur de 26000 euros de levée de fond (alors que la moyenne sur ce genre de don s’élève entre 3000 et 5000euros), un premier résultat plus qu’encourageant.