La mémoire de Denis Donikian dépasse largement sa propre mémoire. Il en va sans doute ainsi de celles et ceux qui portent en eux les souffrances de leurs parents, quand celles-ci sont niées, ou non dites, « assoiffés de ce qu’ils ne voient pas mémoire d’une perdition / maudite ». Il questionne donc « le vieux pays agonisant » et le parcourt sans relâche, découvrant amoureusement les paysages, homme mobile « à la rencontre de sédentaires » par une promenade « de quête poétique ou de santé mentale ». Chemin faisant, il déchiffre les signes non encore traduits d’un disque d’argile, il construit des totems à son image, il publie ses textes en édition bilingue, français traduit en arménien, parce que cette langue est unique au sein des langues indo-européennes, qu’elle a un alphabet spécifique et qu’elle est divisée en deux groupes : l’arménien oriental (en République d’Arménie) et l’arménien occidental (parlé par la diaspora). Mais, pour Denis, le souci de l’Arménie est souci du monde : il est cet homme ayant vécu, appris et enseigné en Europe, en Asie, ayant voyagé dans des îles, sur des continents, lisant l’amour dans les gravures végétales d’Isabelle Brillant, et faisant de l’humour un de ses outils d’expression.