Raphaël a déjà passé quatorze ans en prison. Mais il ne s’est pas arrêté pour autant. Le voici sur un gros coup: le braquage d’une bijouterie, avec son petit frère William, et deux autres complices. Mais les choses ne se passent pas tout à fait comme prévu: il y a eu des morts, et William est gravement blessé. En fuite, alors qu’ils doivent s’éloigner au plus vite, ils décident malgré tout de s’arrêter pour chercher un médecin. Pour plus de sécurité, ils choisiront un vétérinaire. Ce sera Sandra, qu’ils attirent prétextant un chien renversé. Sous la menace, elle emmène les quatre braqueurs chez elle, le temps que William se remette. Ils pensent la tenir par la peur. Sandra multiplie les tentatives pour les faire partir, surtout avant le retour de son mari. Et très souvent, Raphaël se demande si cette femme n’est pas elle aussi une victime à sauver, ou alors une manipulatrice très douée. Ou pire encore… Combien de chance y avait-il qu’ils se réfugient dans la maison du diable?
J’ai ouvert ce livre sans vraiment savoir à quoi m’attendre, découvrant l’auteure et n’étant pas une grand habituée des polars. J’en ressors avec le souvenir d’une lecture très éprouvante, et l’impression d’un très bon livre qui pourtant ne m’a pas plus emballée que ça. Je m’explique. L’intrigue est d’une grande ingéniosité. Dès le départ, on nous plonge chez les méchants: un groupe de braqueurs, durs, de vraies crapules sans états d’âme autres qu’un sens du devoir familial assez exacerbé qui sera l’un des fils rouges du roman. Le groupe n’a d’ailleurs rien de vraiment soudé puisqu’on les devine prêts à se larguer les uns les autres: une véritable cocotte minute qui menace d’exploser lorsque Will est blessé et qu’ils doivent adapter leurs plans pour le sauver. Difficile alors d’imaginer que parmi la centaine de maisons qu’ils pouvaient investir, ils allaient choisir la seule qui soit habitée par la pire ordure qui existe et qui, en plus, peut les faire pleurer comme des fillettes. Au point que les quatre méchants se voient investis du rôle de gentils, de héros, de garants de la morale et des valeurs, tant on a basculé dans un monde qui même pour eux est surréaliste.
A maison de monstre donc, intrigue de monstre. Karine Giebel n’a pas peur d’aller loin, très loin dans l’horreur, dans le glauque, dans l’insoutenable, en abordant les sujets les plus dérangeants, et il faut au moins ça pour que les braqueurs nous soient à ce point sympathiques. Et c’est là que ça a commencé à me gêner, parce que finalement, ça n’en finit plus. Le livre est long, et j’ai parfois eu l’impression d’une surenchère d’horreur sans autre but que de tester jusqu’où les personnages pourront aller et surtout jusqu’où le lecteur va les suivre. Vous me direz, c’est le concept, mais moi, la simple démonstration que oui, ce monstre sera un monstre même quand vous penserez qu’on ne peut pas faire durer plus longtemps, j’ai trouvé ça un peu linéaire et lassant. J’ai été beaucoup plus intéressée à découvrir le passé des deux frères unis dans le crime, ou celui de Sandra, la vétérinaire qui partage la vie du monstre, ou encore dans le plan élaboré peu à peu par Raphaël pour essayer de sauver un maximum des victimes. Là se dévoile un vrai talent pour les personnages complexes, qui redéfinissent les frontières du bien et du mal, de l’innocence et de la culpabilité. Certains salueront ce saisissant huis-clos de six cents pages, moi j’ai trouvé que l'intrigue trop linéaire desservait un peu l’intérêt et la tension.
La note de Mélu:
Un bon roman, mais pas pour moi.
Un mot sur l’auteure: Karine Giebel (née en 1971) est une auteure française spécialisée dans les polars.