Le nombre de personnes sans-abri a augmenté selon l'INSEE de 50% en 10 ans (1) et toutes les associations s'accordent à dire que ce chiffre est très largement inférieur à la réalité. A l'occasion des Assises pour l'accès au logement des sans abri organisées ce jour par la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale en janvier dernier, Sylvia Pinel, ministre du Logement, de l'Égalité des territoires et de la Ruralité, a déclaré :
" Notre objectif est de dépasser la seule réponse à l'urgence et d'aider les personnes les plus démunies à sortir définitivement de la rue, en les accompagnants dans un parcours d'insertion vers le logement. Nous finalisons un plan triennal de réduction des nuitées hôtelières. Son objectif est d'inverser la tendance actuelle, en substituant à l'hôtel des dispositifs alternatifs réellement capables de répondre aux besoins des familles. ", a-t-elle précisé. Ce plan, qui sera annoncé prochainement par le Président de la République, a pour objectif d'offrir aux familles des conditions d'hébergements plus dignes et mieux adaptées à leurs besoins (intermédiation locative, résidences sociales, maisons-relais...), en réorientant les crédits consacrés au financement des nuitées hôtelières vers ces autres dispositifs.
Concernant la période hivernale passée :
Les mesures du plan de relance de la construction annoncées en 2014, doivent par ailleurs permettre de créer plus de logements diversifiés et adaptés aux besoins des personnes.
Du rêve à la réalité
Pourtant, les attributions d'hébergement dépassant une nuit sont toujours aussi rares et aussi longues. Et pendant ce temps, les hébergements d'urgence diminuent depuis la fin du mois de mars. En ce début de printemps 2015, les personnes à la rue que nous rencontrons sur notre parcours le samedi soir sont de plus en plus nombreuses. En 2014, le collectif Morts de la rue dénombrait 483 sans-abris morts dans la rue. Le 7 mai, il en annonçait déjà 134 !
Le 24 avril 2015, le secrétariat d'Etat au Budget annonçait 14 gisements d'économies possibles, dans le cadre de la limitation de la hausse de la dépense publique pour 2016, parmi lesquels l'hébergement d'urgence. La même semaine, le comité de suivi du droit au logement opposable consacrait son 8e rapport au droit à l'hébergement opposable (Daho). La loi du 5 mars 2007 sur le droit au logement opposable (Dalo) prévoit en effet un recours spécifique pour les demandeurs d'un hébergement ou d'un logement adapté n'ayant pu être accueillis (2). Publié le 15 avril 2015, le rapport dresse un bilan alarmant de la mise en œuvre du Daho.
1) Limites de cette étude - Elle ne comptabilise que les sans abris ayant eu recours aux services ( hébergement d'urgence, petits déjeuners) implantés dans les villes de plus de 20 000 habitants au cours du seul mois de février 2012... Sachant que les appels aux 115 sont très loin de tous aboutir, on peut imaginer que le nombre de sans-abris soit 4 fois plus important en 2013 qu'en 2001 où l'INSEE en comptabilisait alors plus de 100 000... Voir cet article à propos de cette étude.
Une étude de la division logement de l'INSEE, publiée en janvier 2011, était parvenu au chiffre de 375 000, soit une évaluation très proche de celle de P. DECLERCK :
- 133 000 personnes sans domicile.
- 38 000 vivants à l'hôtel
- 79 000 hébergés chez des particuliers
- 110 000 vivants dans un habitat mobile
- 34 000 en hébergement longue durée.
2) Selon Vie publique Le nombre de recours devant la commission de médiation au titre du Daho est en constante augmentation depuis 2008. Il demeure pour autant assez faible en comparaison du nombre de ménages qui devrait accéder à un hébergement stable. En 2013, 10 354 recours au titre du Daho ont été déposées. 51% des demandes ont fait l'objet d'une décision favorable, mais moins d'un quart des personnes jugées prioritaires (18,8%) ont reçu une offre d'hébergement en 2013. Au total, depuis la mise en place du Daho, 17 279 ménages restent à accueillir sur 28 479 ménages reconnus prioritaires, soit 60,7%. Seules 5 983 personnes ont effectivement été accueillies, soit 21%. Pour le comité de suivi, ce bilan inquiétant est le fruit des nombreuses entraves dont souffre la mise en œuvre du Daho. Plusieurs axes d'action sont proposés afin de remédier à cette situation :
- Améliorer l'offre quantitative et la gestion des places d'hébergement et de logements adaptés, ce qui suppose de mieux identifier les besoins territoriaux et de rompre avec un secteur de l'hébergement " encore trop axé sur un fonctionnement urgentiste et saisonnier ".
- Mieux faire connaître l'existence et le fonctionnement du recours hébergement prévu par la loi Dalo.
- Harmoniser et simplifier les critères d'appréciation du caractère prioritaire et urgent utilisés par les commissions de médiation pour l'examen des demandes d'hébergement ou de logement d'insertion.
- Revoir les modalités du recours Daho, car elles ne sont pas adaptées à l'hébergement d'urgence.