Sujet particulièrement difficile que cette tête bien perchée : l’éducation parentale, le passage à l’adolescence, les difficultés psychologiques, la justice. Des thèmes bruts centrés autour de Malony qui a mal démarré dans la vie : un père décédé, une mère trop jeune qui ne comprend pas ses responsabilités, ni comment elle doit élever un enfant, traumatisant son fils à renforts de vulgarités et d’un manque d’amour, ou du moins, d’un absence total de jugement, de prise de conscience, et surtout, un manque cruel de maturité.
La Tête haute fait exploser le talent du jeune acteur Rod Paradot, repéré au détour d’un casting sauvage, débarquant de son CAP dans un univers qui lui est totalement inconnu et faisant face au monument français qu’est Catherine Deneuve. Bon pressenti pour Emmanuelle Bercot, Paradot incarne terriblement bien Malony, à la fois dur, sensible, violent, le jeune homme ne joue pas, il vit son personnage, dégageant une rage profonde, un mal-être, oscillant entre une personnalité qui tente de s’en sortir, et qui replonge à la moindre contrariété. Rod Paradot exprime avec une sensibilité inouïe les démons, les doutes et le déchirement qui éclatent dans la tête de Malony. Benoît Magimel ressort enfin de sa sieste en nous offrant un éducateur spécialisé hanté par son passé et à fleur de peau, ne tombant jamais dans le sur-jeu. Quant à madame Deneuve, point d’éclat, mais un personnage qui cache difficilement sa tendresse et son grand cœur derrière une poigne ferme, rendant son personnage attachant. Mon regret se porte sur Sara Forestier, cantonnée au même genre de personnages paumés depuis quelque temps, ne sortant rien d’original à l’écran. De plus, son dentier m’a sacrément gênée (ce n’est pas de sa faute cela dit), volonté d’accentuer les traits ingrats de son personnage (les vêtements, la maquillage et le cheveu gras sont pourtant suffisants).
Le film aurait mérité quelques coupes pour ne pas avoir ce ressenti d’avoir vu un film de plus de deux heures. Certains passages sont maladroits, mal expliqués et confus, notamment sur le traitement de la relation sentimentale, en l’occurrence comment elle débute. Aussi, une justice bien clémente, un peu trop parfois, qui ne doit pas être représentative de notre système judiciaire, où la juge laisse plus paraître sa sensibilité, sa peine, plus qu’elle ne prend des décisions drastiques, alors que Malony enchaîne les déconvenues. La Tête haute, malgré quelques défauts, qu’on lui pardonnera, n’en reste pas moins percutant et fort en émotions.
En salles depuis le 13 mai.