Ce n’est pas ce à quoi l’on s’attendait, tu t’en doutes déjà. Quelque chose se tramait, et on pouvait déjà ressentir cette appréhension à la vue de leur nouvelle jaquette. Une crainte confirmée avec la mise en ligne de Believe et The Wolf quelques jours plus tard. Un signal d’alarme. Malgré ces premières déceptions, on espérait encore. Au final, oui, on est déçues de Wilder Mind, le troisième album des Mumford and Sons. Très déçues. Mais il serait trop aisé de vous concocter un pamphlet haineux et vindicatif à la Charles Gautier sur l’Obs, alors on va quand même essayer d’en parler un peu.
Difficile de faire mieux que Sigh No More puis Babel (mais surtout que Sigh No More, on est d’accord). C’est un fait. Ce sont deux très bons albums folk de ces dernières années. Et puis Babel c‘est surtout celui qui a fait connaître le groupe à des millions de personnes à travers le monde et permis à bien des groupes de surfer sur la médiatisation à outrance des Mumford… Ils ont commencé par le folk, ils ont connu le succès grâce au folk. Délicate décision que de s’en détourner. Comme si Booba se mettait à la comédie musicale.
Difficile de poursuivre dans la même veine. Ils le disent noir sur blanc : “nous voulions surtout ne pas refaire les mêmes choses.” On peut comprendre. Deux (bons) albums folk c’est bien déjà bien. Trois ça commence à faire trop ?! Plus la tournée interminable, plus la centaine de festivals, les longues journées de promo… Eux préfèrent justifier leur changement de cap par la logique d’une force naturelle qui leur a fait abandonner le banjo, la grosse caisse et l’accoustique au fil du temps. Une évolution plutôt qu’une rupture apparemment. Pas d’autre explication que ça, c’est la vie baby, tout le monde change, tant pis pour nous. Si t’es pas content tu n’écoutes pas.
Les premières notes de Tompkins Square Park annoncent la couleur : guitare électrique et batterie au son électronique. Une batterie dont le timbre me reste douloureusement dans les tympans tant on dirait une boîte à sons (même combat pour Wilder Minds, Ditmas, Just Smoke…). Oui, cette batterie me dérange, elle n’a pas sa place. Pour moi, elle est en dedans, elle sert de base ultra équilibrée (trop) aux autres couches musicales qui s’y superposent trop proprement. L’accompagnement est d’une manière générale très linéaire, comme détaché de la ligne vocale, sauf lors de ces parties instrumentales qui sont souvent placée avant le dernier refrain (basique chez Mumford). Pourtant les textes sont bons, dans la continuité de ce qu’ils faisaient auparavant, parcourus de regrets et de non-dits parfois destructeurs.
Deuxième chose flagrante qui m’a beaucoup gênée : cet album ‒ dans son ensemble ‒ est du Coldplay post X&Y : The Wolf, Believe, même dans Only Love, qui est pourtant une chanson que j’apprécie. Ça s’entend, ça se ressent, et c’est rédhibitoire. En revanche, cela ne m’a pas empêchée d’écouter avec plaisir Monster, Only Love et Cold Arms, trois jolies compos que j’aurais bien plus appréciées en version acoustique (imagine Cold Arms en guitare folk-voix dans ton salon, sérieusement, j’en ai des frissons).
On ne vous dit pas que c’est un mauvais album ‒ loin de là ‒ au contraire c’est un bon album pop-rock, digne des grandes stations de radios. Ce n’est simplement plus une musique qui nous fait frissonner, ce genre de musique qui parvient à t’inonder d’une vague de plénitude mélancolique/jouissive et te fait perdre tout repère spatio-temporel comme pouvaient l’être Timshel, I Gave You All, White Blank Page…
Résolvons nous à tolérer la mort des Mumford and Sons que l’on aimait. Mais comme dans toute période de deuil, après le déni, la colère et l’incompréhension, la route peut-être longue avant l’acceptation.
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