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Un champion potentiel à l'exportation

Publié le 13 mai 2015 par Toulouseweb
J'avais prévu de vous parler cette semaine de la vente des Rafale au Qatar.
J'avais prévu d'analyser comment Dassault cible les pays potentiellement intéressés par son avion, comment les équipes sur place contactent les plus hautes autorités et font une veille de présence trčs forte dans les pays ciblés. Mais l'actualité commande et c'est bien sűr l'accident de l'A400 M qui retient aujourd'hui mon attention.
Revenons sur le crash de cet avion militaire qui avait quitté quelques jours plus tôt les chaînes de l'usine d'Airbus defense and space située ŕ Séville. Il s'agissait du 1er vol réalisé par la machine qui devait ętre livré en juin prochain ŕ la Turquie. A son bord, 6 membres du personnel, toutes des personnes hautement qualifiées.
Aprčs avoir décollé sans problčme, l'A400 M a fait demi-tour pour un atterrissage d'urgence. Il a heurté malheureusement une ligne ŕ haute tension, est tombé au sol et a immédiatement pris feu. Bilan 4 morts parmi l'équipage d'essai, les 2 autres membres ont été éjectés et sont gravement blessés.
Voilŕ pour les faits. Regardons maintenant les conséquences pour ce programme européen trčs ambitieux . En fait ce programme est mal né et accumule les incidents depuis qu'il a été lancé. De nombreux retards et des surcoűts importants de 6,2 milliards d'euros sont officiellement actés. Le 1er avion a été livré ŕ la France en septembre 2013 avec 4 ans de retard. Comment expliquer cela ?
On se souvient du FADEC ( Full automatic digital engine control) . Le FADEC de l'A4OOM est une véritable usine ŕ gaz. Il est alimenté par 275 000 informations contre 90 000 sur l'A380 ou sur le Rafale. Le FADEC avait du mal ŕ contrôler les 10 000 chevaux de chacun des 4 moteurs. Pour aller plus vite, on s'est contenté d'une certification aux normes civiles. Une 1čre pour un avion militaire.
Safran impliqué dans le moteur indique que son propulseur, son FADEC, ont satisfait ŕ plus de 2 500 heures d'essai au sol et montré une complčte conformité aux certifications concernant la poussée, la consommation et la masse.
Comment expliquer les surcoűts ? D'abord ŕ cause de la décision politique qui a voulu que les 7 pays commanditaires développent eux-męmes leurs moteurs au lieu de les acheter Ť sur étagčre ť ŕ un motoriste américain. La France n'a reçu que 6 avions sur les 174 commandés. L’Allemagne a été encore plus mal servie avec un seul appareil livré. Airbus a dű provisionner 551 millions d'euros pour faire face aux retards. Selon le Spiegel, l'avion allemand avait 875 anomalies ce qui a provoqué le courroux public de la ministre allemande de la défense. Tom Enders, le patron du groupe, a alors présenté ses excuses et surtout il a changé les hommes au niveau de la direction.
Les clients de l'A400 M ont réagi de façon différente aprčs l'accident. Les militaires allemands, ceux du Royaume-Uni et de la Turquie ont interdit de vol leurs appareils en attendant d'en savoir plus. Jean-Yves Le Drian pour sa part, tire un excellent bilan des 1čres semaines d'exploitation du gros avion militaire européen. Ť Nos 6 avions ont cumulé 1700 heures de vol de maničre extręmement performantes ť a-t-il expliqué. Toutefois il a indiqué que les avions, sans ętre cloués au sol, voleront moins pour des vols prioritaires en opération. A noter que le nouveau patron d'Airbus défense et espace, Fernando Alonso, a décidé de continuer les vols prévus et il sera lui-męme aux commandes de l'avion !
Parions que le programme va continuer mais désormais les chances d'exporter l'A400 M dans d'autres pays sont trčs minces pour l'instant. Il faudra ętre patient et expliquer dans le détail le pourquoi du crash. En espérant que les mesures de précaution quant ŕ l'emploi de l'avion ne dureront pas trop longtemps.
Nous l'avions écrit dans une précédente chronique, l'A400 M est cher et compliqué ŕ mettre en œuvre. Paris et Madrid, on l'a bien compris, veulent continuer le programme européen. On se trouve un peu dans la configuration du Rafale avant qu'il remporte tant de succčs ŕ l'export. Nous écrivions que le Rafale était cher et compliqué. D'ici 10 ans il ne sera plus question de cet accident de Séville et l'A400 M sera peut-ętre champion ŕ l'exportation.
La chronique AeroMorning de Gérard Jouany

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