C’est idiot de commencer par une référence aussi mythique et galvaudée. Mais, merde, allons-y. Envoyons valser les barrières propre de la fan attitude pour parler sincèrement. La première fois que j’ai entendu Eaves, j’ai pensé à Jeff Buckley et à Neil Young. Oui, c’est galvaudé, je t’avais prévenu mais ça ne me gène pas d’en faire des caisses sur ce mec. En vrai, il s’appelle Joseph Lyons, un Anglais de Leeds, fan de Bob Dylan, qui se cache derrière des rideaux de cheveux pour chanter. Pourtant, il n’y a pas de quoi avoir peur ou honte. Ce mec a une voix d’or et des doigts d’orfèvre et il a gravé les talents que la généreuse Mère Nature lui a offert dans un album, non, un écrin de folk-rock baroque baptisé What Green Feels Like.
Il a beau avoir la vingtaine au compteur et le visage d’un adolescent, Eaves a déjà tout d’un grand qui préfère faire hyper compliqué quand on peut faire super simple. Il suffit d’écouter les tourbillons mélodiques qui emportent la plupart des chansons de l’album. Pylons, Dove In Your Mouth, Horn a Gum… Des titres qui mélangent les influences, des batteries qui deviennent folles, des guitares qui s’emballent, un soupçon de rythm & blues (le vrai, pas celui de Craig David et consorts), des sonorités psyché…. et puis, parfois il s’agit juste d’un tête à tête avec une guitare. Une voix écorchée et gorgée de larmes qui laisse deviner que tout n’a pas été facile dans la vie de ce garçon.
D’ailleurs, il nous laisse un peu rentrer dedans e avec le terriblement intime As old as a Grave dans laquelle il évoque un père alcoolo et les difficultés de la vie quand on est fils d’une fratrie de sept enfants et issue d’une famille ouvrière où tout se gagne à la sueur du front. Le folk c’est dans la douleur qu’il s’écrit. En voici encore une preuve.
A l’aise avec sa guitare aussi bien sèche qu’électrique, Eaves se raconte parfois aussi au piano, comme sur Timber. Et là, ça fait encore plus mal. Mais ce qui marque surtout chez ce jeune Anglais c’est sa voix. Cette voix qu’il utilise comme un véritable instrument. Cette voix qui susurre, qui chuchote, qui tutoie les aiguës et qui oui, je le répète me fait penser à Jeff Buckley, par moment. A Neil Young par d’autres. En tout cas, une chose est sûre, le fantôme de l’un plane au dessus et pour moi, il est claire qu’il se situe dans la fière lignée de l’autre. Le folk-rock a, en tout cas, trouvé un nouveau génie en la personne d’Eaves.