Pour cette première édition, j'ai décidé de vous présenter trois témoignages classiques (forcément). Je pense que beaucoup d'entre vous les ont déjà lus ou en tout cas ne les découvriront pas ici, mais je trouvais que c'était important d'en parler, et je ne me voyais pas commencer par autre chose.


Anne Frank est née le 12 juin 1929 à Francfort. Sa famille a émigré aux Pays-Bas en 1933. À Amsterdam, elle connaît une enfance heureuse jusqu'en 1942, malgré la guerre. Le 6 juillet 1942, les Frank s'installent clandestinement dans " l'Annexe " de l'immeuble du 263, Prinsengracht. Le 4 août 1944, ils sont arrêtés sur dénonciation. Déportée à Auschwitz, puis à Bergen-Belsen, Anne meurt du typhus en février ou mars 1945, peu après sa sœur Margot. La jeune fille a tenu son journal du 12 juin 1942 au 1er août 1944, et son témoignage, connu dans le monde entier, reste l'un des plus émouvants sur la vie quotidienne d'une famille juive sous le joug nazi.
Anne voulait devenir écrivain et s'essaye ainsi à l'écriture dans son journal. Elle y développe ses relations avec ses parents et sa soeur, sa vision du monde, ses ambitions, ses déceptions. Avant de témoigner sur son époque, Anne écrit surtout sur sa vie personnelle et ses émotions de telle sorte qu'on ressent son humanité et sa jeunesse avec beaucoup de force et qu'on se sent très proche d'elle. Ce journal n'est pas celui d'une jeune adolescente banale : on sent déjà malgré son jeune âge sa maturité ainsi que l'acuité et la pertinence de son jugement. Un témoignage troublant et profondément humain à lire pour reprendre pied avec la réalité.
« Lorsqu'une personne du dehors entre chez nous, avec la fraîcheur du vent dans ses vêtements et le froid sur son visage, je voudrais cacher ma tête sous les couvertures pour faire taire cette pensée : « Quand nous sera-t-il donné de respirer l'air frais ? » Et parce que je ne peux me cacher la tête sous les couvertures, obligée, au contraire, de la tenir haute et droite, les pensées viennent et reviennent, innombrables. Crois-moi, après un an et demi de vie cloîtrée, il y a des moments où la coupe déborde. Quel que soit mon sens de la justice et de la reconnaissance, il ne m'est plus possible de refouler mes sentiments. Faire du vélo, aller danser, pouvoir siffler, regarder le monde, me sentir jeune et libre : j'ai soif et faim de tout ça et il me faut tout faire pour m'en cacher. » p.143, lettre du 24 décembre 1943

On est volontiers persuadé d'avoir lu beaucoup de choses à propos de l'holocauste, on est convaincu d'en savoir au moins autant. Et, convenons-en avec une sincérité égale au sentiment de la honte, quelquefois, devant l'accumulation, on a envie de crier grâce. C'est que l'on n'a pas encore entendu Levi analyser la nature complexe de l'état du malheur. Peu l'on prouvé aussi bien que Levi, qui a l'air de nous retenir par les basques au bord du menaçant oubli : si la littérature n'est pas écrite pour rappeler les morts aux vivants, elle n'est que futilité.
« Aussi, en fait de détails atroces, mon livre n'ajoutera-t-il rien à ce que les lecteurs du monde entier savent déjà sur l'inquiétante question des camps d'extermination. Je ne l'ai pas écrit dans le but d'avancer de nouveaux chefs d'accusation, mais plutôt pour fournir des documents à une étude dépassionnée de certains aspects de l'âme humaine. Beaucoup d'entre nous, individus ou peuples, sont à la merci de cette idée, consciente ou inconsciente, que « l'étranger, c'est l'ennemi ». Le plus souvent, cette conviction sommeille dans les esprits, comme une infection latente ; elle ne se manifeste que par des actes isolés, sans lien entre eux, elle ne fonde pas un système. Mais lorsque cela se produit, lorsque le dogme informulé est promu au rang de prémisse majeure d'un syllogisme, alors, au bout de la chaîne logique, il y a le Lager ; c'est-à-dire le produit d'une conception du monde poussée à ses plus extrêmes conséquences avec une cohérence rigoureuse ; tant que la conception a cours, les conséquences nous menacent. Puisse l'histoire des camps d'extermination retentir pour tous comme un sinistre signal d'alarme. » Préface

Maus est une bande dessinée d'Art Spiegelman. Elle raconte, à travers le dialogue de l'auteur et de son père, juif polonais, survivant des ghettos et d'Auschwitz, l'histoire des persécutions nazies, depuis les premières mesures anti-juives jusqu'à l'effondrement du Troisième Reich et l'immédiat après-guerre.


Voilà donc « mes » trois gros classiques de la littérature de la seconde guerre mondiale et de la Shoah. Les avez-vous lus ? Si oui, dans quel contexte (scolaire ou personnel) les avez-vous découverts ?
S'il fallait en retenir une chose, ce serait leur humanité. A vous maintenant de partager les vôtres et de donner toutes vos recommandations de lectures sur le thème de la seconde guerre mondiale et/ou des camps de concentration en commentaires !