Alors que les Gens du Nord de mon Journal ne m’enchantent plus depuis bientôt une décennie, voilà une décade que le sourire me vient lorsque je songe aux ch’tis de Boon. La fraîcheur de ce film, même s’il puise la mécanique de quelques quiproquos langagiers dans l’efficace Dîner de con, ravit, rassure sur l’existence d’un populaire chaleureux, bon enfant, bourvilien.
Cette fête à l’âme m’incite à effectuer mon devoir de citoyen, limité pour ce dimanche à la plus agreste des élections, les cantonales : comme un printemps de l’électorat. Notre bon Gérard Collomb aime Lyon, et notre arrondissement le lui a bien rendu.
A deux pas du bureau de vote, sis dans une jolie petite école primaire classée, aux pierres de taille apaisantes, j’ai participé au dépouillement et fleuré, dès la première centaine de bulletins, la performance de notre maire sortant. J’ai alors profondément ressenti, comme fondu dans ce réjouissant résultat, que mon exil volontaire des terres picardes avait laissé toute sa place à un serein ancrage lyonnais aux côtés de ma BB. Notre élu Collomb m’offrira donc de belles ballades des bords du Rhône aux futurs bords de Saône sur un vélo’v confortable. Je lui souhaite le plus constructif des mandats.
Goûter cet angle de vie, mais rester sans indulgence pour ce qui se profile par le délire, une espèce de syndrome Kerviel, des fous furieux de l’économie virtuelle. Le sujet serait-il minoré par les grands médias, qui lui ont préféré le plus vendeur fait divers du trader et ses gros pâtés boursiers, en raison d’une panique monstre qui suivrait le premier signe d’un effondrement de notre système financier ? Les nouvelles cumulées, dans les pages intérieures de journaux rébarbatifs pour le grand public, et les analyses de certains spécialistes laissent augurer que le Tchernobyl économique ne nous épargnera (!) pas, là où le directeur de la Banque de France psalmodiait du « Tout-va-très-bien ! ». Que les trois plus importantes réserves étatiques de l’Occident injectent quelque deux cents milliards de dollars dans les circuits financiers sans que cela rassure durablement les actants grégaires de l’économie virtuelle suffit pour pressentir le pire.
Jamais je ne me suis adonné à ce petit jeu du boursicoteur en herbe ; en revanche, je suis contraint, par le contrat social, de laisser le petit pécule gagné à la disposition des frileux opportunistes qui s’excitent sur les rumeurs pour forger, de fait, l’économie mondiale. La gabegie des subprimes a infecté tous les réseaux financiers : la malfaisance des responsables sera occultée et les Etats viendront éponger les pertes, dans le meilleur des cas. Pendant ce temps, les fonds souverains d’autocraties (pour certaines revendiquées communistes !) se dorent les bourses en pleine croissance…
Finalement, revenir à l’univers de proximité, aux êtres chers encore de ce monde ou disparus. Centrer ses sens sur la complicité duale de belles âmes choisies pour ne pas sombrer dans de barbares représailles. Ainsi, mon aimée grand-mère, disparue fin 2006, et qui me manque pour toujours et à jamais. S’emplir de son souvenir et embrasser un bel angle de vie.