Pierre, vous permettez que je vous appelle François ? Car de Pignon ou Perrin, même si votre carrière ne se résume pas uniquement à vos collaborations avec Francis Veber ou Yves Robert, ce sont notamment ces rôles-là qui auront marqué le spectateur que je suis. Mais pas seulement soyons clairs ! Le téléspectateur assidu des films du dimanche soir vous doit tant de souvenirs, de sourires mâtinés de fous-rires que je ne peux aujourd'hui, lorsque je me retourne sur les films qui ont bercés mon imaginaire, m'empêcher d'y trouver la trace de votre regard clair et pétillant et de votre incroyable faculté à exprimer les sentiments les plus variés par une gestuelle de Distrait lunaire. Si je vous ai découvert par l'intermédiaire d'un poste de télévision posé dans une salle à manger des années soixante-dix, je vous ai suivi de manière inconditionnelle lorsque plus tard mon appétence pour le cinéma m'a conduit dans les salles. J'avais huit ans et je vous découvrais dans Le coup du parapluie. Je vous connaissais déjà, du moins le croyais-je naïvement du haut de ma cinéphilie de gamin, la télévision de papa m'avait fait vous aimer déjà, et à de multiples reprises lors de vos folles années 70 ( Le grand blond avec une chaussure noire bien sûr, mais aussi La course à l'échalote, La moutarde me monte au nez, Le jouet, La carapate, Je sais rien mais je dirai tout, Je suis timide mais je me soigne...), mais en cette année 1980 qui ouvrait votre seconde décennie marquante, votre bonhomie éclatait à mes yeux sur grand écran. Lors de ces années 80 vous serez un peu moins prolifique, mais vous allez réussir un triplé historique qui entrera dans les annales ( La Chèvre, Les compères, Les fugitifs). Votre duo avec Depardieu, les dialogues de Veber, votre puissance comique se trouvait décuplée par cette double association. Ce fut un tel bonheur de spectateur -vous voir vous prendre les pieds dans les tapis avant d'arriver à un contrôle total devant un importun qui ne voulait pas que vous lui piquiez son chariot, voir Depardieu vous expliquer comment mettre un coup de tête de la meilleure des manières ou encore vous voir désarmé et malheureux devant le silence d'une petite fille-, que je vous ai aimé plus encore à partir de ce moment-là. Je n'étais pas le seul, vous étiez adulé à cette époque et en termes d'entrées vous teniez la dragée haute aux De Funès, Belmondo et autres. Votre silhouette dégingandée, votre façon de vous mouvoir dans l'espace, votre personnage de rêveur romantique qui séduisait autant par sa maladresse que par sa bonté, tout cela a fait à la fois votre popularité et vous a peut-être aussi coincé dans un certain type d'emploi. Alors certes les énormes succès commerciaux sont derrière vous mais vous avez été un emblème de ce cinéma qualité France qui s'est dilué au fil du temps dans des limbes de facilité. On vous aime pour votre générosité Pierre, pour votre honnêteté, parce que vous n'avez jamais cédé aux sirènes d'un cinéma mercantile et que vous êtes resté vous-même. Un homme épris de liberté, une liberté que vous trouvez désormais peut-être plus sur les planches, là où vous pouvez encore être vous-même. Au moment où paraissent vos Mémoires cher Pierre, j'aimerais vous dire à quel point vous faites partie de la nôtre. Vous êtes de ces artistes dont on a pris possession sans s'en rendre compte, vous faites partie de la famille et vous aurez beau être distrait, nous n'aurons de cesse de vous le rappeler.
Je sais rien, mais je dirai tout Pierre Richard avec Jérémie Imbert Sortie le 6 mai 2015 Editions Flammarion Pop Culture
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