Dans cette fameuse semaine du mercredi 6 mai de sorties d’avant Cannes, j’ai eu la chance de voir 5 films en avant première, et parmi ces 5 films, trois dont j’ai eu envie de parler avant leur sorties, afin de les soutenir (les autres ne m’ont pas forcément déplu, mais moins que ceux là…
Et après "Zaneta" et "Hyena" ( mes chroniques d'hier et de ce matin) j’aimerais en ce lundi après midi vous dire quelques mots sur "Melody", un long métrage belge de Bernard Bellefroid dont le sujet a priori pourrait faire peur, mais dont le traitement efface toute crainte préalable.
Le sujet en question n'est autre que celui qui est venu frontalement sur le tapis l’an passé et qui a largement déclenché les passions et les (pas toujours brillantes) discussions, avec la loi pour le mariage pour tous (alors qu'il ne figurait pas même dans la loi au départ), c’est celui de la gestation pour autrui (GPA), autrement dit, même si plus personne, je pense ne l’ignore encore, le fait que des personnes stériles font appel à des mères porteuses pour avoir un enfant.
ON aurait donc pu craindre largement que le cinéaste Bertrand Bellefroid empare de ce sujet d'actualité pour en faire un film dossier classique, avec thèse anti thèse synthèse afin d’accompagner des débats télévisés du genre, mais heureusement le réalisateur namurois , contourne toute polémique et didactisme pour aller du côté de l'intime et l'humain et réaliser un mélodrame féminin subtil et assurément poignant.
En se focalisant sur l'histoire bouleversante de Melody, une jeune coiffeuse qui accepte de porter l'enfant d'une riche Anglaise, le film se propose en effet de nous offrir un double portrait et une double facette de la problématique liée à la GTA, à savoir l'impossibilité d'avoir un enfant d'un versant , et dans l'autre versant, les incertitudes liées entre la conscience de l'abandon et la volonté de disposer de son propre corps.
Résultat : un film intime et sensible qui a pour point de départ les mères porteuses, mais qui parle avant tout de filiation et d'adoption. Portrait psychologique très finement brossé , que ce soit celui de la mère porteuse comme de celle qui en fait la demande, la relation qui s’installe entre Melody et Emily pourrait être prévisible dans son shéma( deux personnes radicalement opposées qui vont finir par tisser des liens très intimes), et au contraire, elle se révèle juste et intense, grâce à l'écriture,subtile, qui évite pas mal de passages obligés, et la mise en scène, sobre mais au cordeau ( et qui s'attarde longuement sur les visages de ses protagonistes) de Bernard Bellefroid.
Cette réussite résulte aussi grandement à la performance de ses deux actrices.
Le cinéaste a eu le nez creux dans son casting pour choisir deux actrices splendides pour interpréter les rôles de la mère et de la fille : Lucy Debay, jeune comédienne belge et Rachael Blake une splendide comédienne australienne, reconnue dans son pays.L'opposition est parfaite entre Lucie Debay à la fois fragile et entière, et Rachael Blake ( aux faux airs de Charlotte Rampling), bouleversante et magnétique en femme de pouvoir, mais qui voit ses doutes la tirailler.
Le talent de Rachel Blake et Lucie Debay, justement récompensées par le prix des meilleures actrices au Festival du Film du Monde de Montréal, éclate littérallement dans toutes les scènes de ce film âpre de prime abord, mais si sensible et si délicat, à voir dès mercredi dans les salles, espérons nombreuses qui le programmeront.
Melody - Bande-annonce VO sous-titrée français