"S'il y a encore quelque chose, cela se tient dans l'ombre, juste hoirs de portée de la lumière (donc du regard).
Pas au ciel, mais sur terre. Pas de petit ange, mais un enfant de l'ombre. Un lys parmi les fleurs."
Y a-t-il quelque chose de pire que la perte d’un enfant ?
Pieter Frans Thomése, journaliste néerlandais, a perdu une fille de quelques semaines. Après cette tragédie, c’est à travers l’écriture qu’il tente de faire son deuil.
En moins de 125 pages, L’enfant ombre rassemble une cinquantaine de courts textes qui traitent du deuil, de la mort, de la perte. Le sujet peut faire peur et rebuter mais jamais la lecture n’est plombante, bien au contraire.
Dans un style sobre et épuré, mais émaillé de quelques références littéraires, Heidegger, Rilke ou Emerson par exemple, l’auteur nous fait partager ressenti et sentiments. Il nous livre ses impressions sur la vie à réapprendre malgré l’absence. Chaque souvenir, chaque odeur, chaque rencontre qui invariablement ramènent à la personne disparue. Il s’interroge aussi sur le devenir de la personne disparue. Autant de questions que tout un chacun peut se poser, autant de réponses qui susciteront la réflexion, réflexion qu’il mène brillamment.
C’est extrêmement bien écrit, c’est fort, c’est parfois poétique et ça ne sombre jamais dans le pathos. On lit ces textes. On les relit. On les savoure. On voudrait retenir certains passages pour mieux s’en imprégner tant ils sont troublants de justesse et de véracité.
L’enfant ombre de Pieter Frans Thomése, une lumineuse pépite…
P. F. Thomése
"LE MOT MANQUANTUne femme qui enterre son mari est appelée veuve, un homme qui se retrouve sans femme, veuf. Un enfant sans parents est orphelin. Mais comment s'appellent le père et la mère d'un enfant mort ?
L'odeur des draps frais, la fenêtre de la chambre ouverte. Un nouveau jour.
La lumière du soleil qui entre et ne la retrouve nulle part."
"Tu es devenue une vue de l'esprit. Mais est-ce bien toi ? Le silence crie dans chaque pièce que tu es encore là, le vide te cache dans chaque espace libre."
"Notre vie s'est refermée comme un livre que nous avions commencé à lire au lit. A présent que nous le reprenons, nous ne retrouvons plus la page où nous en étions restés."
"Cesse-t-on d'être amoureux quand la personne aimée cesse de vivre ? Où va l'état amoureux quand le corps mort a été réduit en cendres ? Il se réfugie dans des images. Le corps a disparu de la surface de la terre, mais non tout ce qui peut y faire penser."
Actes SudISBN 2 7427 5204 8123 pages2003 / 200413,70€