Masqué, mais non caché, derrière l’acronyme MG, également choisi pour titre de cet album de seize titres exclusivement instrumentaux, le songwriter de Depeche Mode se fait en tout cas résolument plaisir, et ça s’entend.
Dès le début, l’album est empli de sonorités qui, toutes, auraient effectivement pu être mises en lumières par la voix, au choix, de Dave Gahan pour le groupe, ou de Martin Gore lui-même, pour cet album solo ou un album de Depeche Mode comme il le fait de temps en temps.
Si « Pinking » est tout de suite intéressant, en à peine plus de deux minutes, les trois minutes de « Swanning » me mettent plutôt mal à l’aise. On se sentirait presque dans une usine, enfumée, à la Black Celebration. La vie en moins.
« Exalt », en quatre minutes trente, est le morceau le plus long : il nous ramène tout juste à la surface, et me rappelle un peu certaines productions d’un autre britannique, Howie B. Même s’il n’en a pas besoin, et que cela parait même carrément paradoxal, c’est plutôt un compliment pour Martin Gore.
« Elk », le morceau le plus bref (deux minutes), est doux, léger, dépourvu de beats. On croirait presque que la voix de Gore va surgir ! Il y a même un synthé très années 70-80, donc tout a fait rétro.
« Brink » me fait cette fois-ci penser à Ssss, le projet qu’il avait dévoilé en collaboration avec Vince Clarke en 2012 sous le nom de VCMG. Tout aussi dynamique, mais peut-être moins joyeux.
Le premier extrait, « Europa hymn », était tout en langueur, avec un lourd beat. Planant, aérien. La patte de Martin Gore (i.e. d’une ambiance à la Depeche Mode) est là aussi.
À l’instar de « Swanning », et comme le sera « Islet » un peu plus loin, « Creeper » me laisse un peu froid, le malaise en moins, certes. L’enchaînement se fait logiquement avec « Spiral » puis « Stealth », tous deux placés judicieusement en milieu d’album, réveillent un peu la monotonie, parfois glacée, voulue jusqu’ici par l’artiste.
« Hum » replonge dans l’introspection chère à Martin Gore. C’est un morceau très étrange dans sa composition, mais j’adore le concept. Il y a presque des éléments me remémorant l’Aphex Twin de Selected Ambient Works II.
Assurément le morceau le plus lourd, « Crowly » est même un peu angoissant. La tonalité de MG jusqu’ici est résolument grise, et « Crowly » appuie fort sur le crayon pour ne pas nous laisser de doute.
La fin de l’album arrive, petit à petit, mais il n’y a globalement aucune évolution tant MG déambule dans des ambiances qui s’entremêlent. « Trysting » est bizarre. « Southerly » est plutôt voluptueux, emprunt d’une certaine espérance, et c’est de toute évidence l’un des rares moments lumineux de l’album. « Featherlight » nous amène, à son tour, vers une conclusion moins glauque qu’on ne l’aurait imaginé au tout début de notre écoute de MG, mais « Blade » parachève l’ensemble de façon finalement attendue.
En cinquante-cinq minutes, Martin Gore nous aura définitivement laissé davantage perplexes que ravis. Combien d’écoutes faudra-t-il pour apprivoiser cet album si introspectif ? Je n’en sais rien, et je sais que je vais persévérer. Pour autant, je suis tout de même un peu déçu de mes premières écoutes, et ne suis pas spécialement ni enthousiaste ni convaincu que MG devienne, pour moi, un grand disque, ou tout du moins un disque que j’aime écouter avec plaisir.
En somme, j’ai quand même bien l’impression que quelques écoutes suffisent pour avoir tout compris de MG, alors que VCMG se laissait toujours plus apprécier avec un Ssss dont l’ambition était tout simplement – au contraire de MG – très colorée.
(in heepro.wordpress.com, le 04/05/2015)
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