La question est loin d'être anodine. Alors que le CDO a pour mission de porter la stratégie « digitale » de son entreprise, le plus souvent en animant et en orchestrant les initiatives disséminées dans l'organisation, la mise en place du programme « Visa Europe Collab » peut aisément être interprétée comme une prise de conscience de l'impossibilité de transformer la culture de l'intérieur et, par conséquent, de la nécessité d'aborder l'innovation sous un angle différent…
Non que la démarche retenue soit extrêmement originale. Il s'agit en effet de créer un incubateur, au travers duquel l'opérateur de paiements veut faire émerger les idées d'entrepreneurs créatifs, et les amener jusqu'à leur mise sur le marché. Installé dans un premier temps à Londres (encore !), l'objectif est d'accompagner au moins 20 projets dès la première année, dont les plus prometteurs devraient être intégrés dans l'offre de Visa, pour un déploiement rapide auprès de ses clients, banques et autres émetteurs.
Avec ses quelques partenaires, dont une agence de design et un spécialiste de l'accélération de startups, la promesse de Visa aux candidats à son programme est, tout aussi classiquement, de leur apporter son expertise et ses outils dans le domaine des paiements, ainsi qu'un accès aux milliers d'institutions financières et aux millions de commerçants qui utilisent ses services. Avec ce support actif, elle veut les aider à passer en 100 jours de la qualification d'un concept à un prototype validé.
L'ambition ne s'arrête pas là, puisque l'extension de « Visa Europe Collab » à Tel Aviv et Berlin est déjà planifiée, afin d'aller chercher les bonnes idées partout où elles se trouvent. En arrière-plan, Steve Perry, le responsable de cette initiative (et, donc, ex-CDO de Visa Europe), espère qu'elle sera autant une opportunité de promouvoir et développer la culture d'innovation de l'entreprise (et de ses collaborateurs) qu'un véhicule de lancement des leaders du paiement de demain.
Et nous voici revenu au point de départ de ce billet. Le principe d'un catalyseur de la transformation numérique, incarné par un CDO, ne serait-il pas voué à l'échec, en restant trop centré sur l'organisation existante, tout en étant adjacent à la stratégie d'entreprise (et non en son cœur, puisqu'il a son responsable dédié) ? Ou bien est-il préférable de chercher à faire bouger les lignes en attaquant les forteresses internes par une structure constituée hors des murs, avec des « étrangers » ? Le débat est posé…