Le nombre et la qualité des signataires ont commencé à faire bouger les choses. Des délégations formées de Claire Brisset, ancienne Défenseure des enfants, des président(e)s du Syndicat de la Magistrature, de Médecins du Monde, du Comede et d'un militant RESF ont été reçues par les Cabinets de Mme Taubira, ministre de la Justice et de Mme Rossignol, secrétaire d'Etat chargée de la famille. En tout état de cause, la situation va évoluer.
Le 12 mai sera discutée à l'assemblée nationale un projet de loi sur la Protection de l'enfance. A cette occasion, le gouvernement souhaite faire adopter les dispositions de la circulaire Taubira organisant la répartition des mineurs isolés étrangers entre les départements qui ont été invalidée par le Conseil d'Etat. Peut-être déposera-t-il aussi un amendement sur les tests d'âge osseux.
Mais, même si le gouvernement ne le faisait pas ou s'il ne le faisait pas de façon satisfaisante en se contentant de limiter la possibilité de recours aux tests sans les interdire totalement, des parlementaires ont eux aussi déposé des amendements.
- Denys Robiliard, député PS du Loir et Cher a déposé deux amendements cosignés par une cinquantaine de députés PS demandant que les tests d'âge osseux soient interdits pour les MIE en zone d'attente (inscrit dans le CESEDA) et pour les MIE vivant en France (code de la famille). Voir article ci-après.
- Sergio Coronado, Cécile Duflot, Paul Molac et Noël Mamère députés Ecologistes demandent de façon plus large que la détermination de l'âge par des tests osseux soit totalement interdite dans le code civil. Voir article ci-après.
Il reste douze jours pour convaincre les députés, le maximum de députés, de faire changer la loi, si possible en faisant mentionner l'interdiction dans le code civil. Les choses ont commencé à bouger, il faut aller jusqu'au bout, et ensuite continuer !
Amendements proposés par le PS
Dans le cadre de la préparation de la discussion le 12 mai à l'assemblée nationale de la loi Protection de l'enfant, deux séries d'amendements interdisant l'emploi des tests d'âge osseux pour attribuer un âge civil à un individu ont été déposés.
Deux amendements proposés par Denys Robiliard, député PS du Loir et Cher et co-signés par une cinquantaine de députés PS (dont certain avaient été alertés par des RESF). L'un qui propose d'interdire les tests sur les MIE en zone d'attente en modifiant le CESEDA, le second modifierait le code de l'action sociale et de la famille pour empêcher que les MIE y soient soumis à la demande des Conseils départementaux (qui financent les ASE).
AMENDEMENT 1APRÈS ART. 21 BIS
N° AS18
ASSEMBLÉE NATIONALE
PROTECTION DE L'ENFANT - (N° 2652)
AMENDEMENT
N o AS18
présenté par
- Robiliard, Mme Carrey-Conte, Mme Khirouni, M. Amirshahi, M. Philippe Baumel, Mme Troallic, Mme Lemorton, Mme Laclais, Mme Iborra, M. Potier, Mme Zanetti, Mme Récalde, M. Premat, Mme Guittet, M. Juanico, M. Le Borgn', Mme Rabin, M. Hammadi, M. Sebaoun, M. Sirugue, Mme Capdevielle, M. Glavany, Mme Hurel, Mme Untermaier, Mme Bouziane-Laroussi, Mme Lousteau, M. Aviragnet, M. Bays, Mme Gueugneau, Mme Martinel, Mme Corre, Mme Romagnan, Mme Dessus, Mme Marcel, M. Grandguillaume, Mme Sandrine Doucet, Mme Chapdelaine, M. Bardy, M. Cherki, Mme Dagoma, Mme Dombre Coste, M. Germain, M. Bui, Mme Bruneau, M. Marsac, Mme Laurence Dumont, Mme Beaubatie, M. Lesage, M. Colas, M. Assaf et Mme Michèle Delaunay
ARTICLE ADDITIONNEL
APRÈS L'ARTICLE 21 BIS, insérer l'article suivant :
Cet amendement est en cours de traitement par les services de l'Assemblée.
A l'article L. 226-3 du Code de l'action sociale et des familles, après l'alinéa 1er, ajouter l'alinéa suivant :
Cette évaluation ne peut être effectuée selon la méthode des tests osseux.
EXPOSÉ SOMMAIRE
La fiabilité des tests osseux effectués aux fins de détermination de l'âge des jeunes est largement critiquée par la communauté scientifique.
Elle expose le jeune à des risques de radiation, puisqu'elle comprend la prise de radiographies.
D'autres moyens existent pour évaluer l'âge, tels que :
La preuve documentaire, pour laquelle il existe une présomption d'authenticité prévue à l'article 47 du Code civil ;
Faisceau d'indices dégagés par un personnel qualifié dans le cadre d'une approche pluridisciplinaire.
AMENDEMENT 2
APRÈS ART. 21 BIS
N° AS19
ASSEMBLÉE NATIONALE
PROTECTION DE L'ENFANT - (N° 2652)
présenté par
- Robiliard, Mme Carrey-Conte, Mme Khirouni, M. Amirshahi, M. Philippe Baumel, Mme Troallic, Mme Lemorton, Mme Laclais, Mme Iborra, M. Potier, Mme Zanetti, Mme Récalde, M. Premat, Mme Guittet, M. Juanico, M. Le Borgn', Mme Rabin, M. Hammadi, M. Sebaoun, M. Sirugue, Mme Capdevielle, M. Glavany, Mme Hurel, Mme Untermaier, Mme Bouziane-Laroussi, Mme Lousteau, M. Aviragnet, M. Bays, Mme Gueugneau, Mme Martinel, Mme Corre, Mme Romagnan, Mme Dessus, Mme Marcel, M. Grandguillaume, Mme Sandrine Doucet, Mme Chapdelaine, M. Bardy, M. Cherki, Mme Dagoma, Mme Dombre Coste, M. Germain, M. Bui, Mme Bruneau, M. Marsac, Mme Laurence Dumont, Mme Beaubatie, M. Lesage, M. Colas, M. Assaf et Mme Michèle Delaunay
ARTICLE ADDITIONNEL
APRÈS L'ARTICLE 21 BIS, insérer l'article suivant :
Cet amendement est en cours de traitement par les services de l'Assemblée.
A l'article L. 221-5 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, avant l'alinéa 1er, ajouter les alinéas suivants :
Le représentant de l'Etat est chargé du recueil, du traitement et de l'évaluation, à tout moment et quelle qu'en soit l'origine, des informations préoccupantes relatives aux étrangers mineurs non accompagnés. L'autorité judiciaire lui apporte son concours.
Cette évaluation ne peut être effectuée selon la méthode des tests osseux.
EXPOSÉ SOMMAIRE
La fiabilité des tests osseux effectués aux fins de détermination de l'âge des jeunes est largement critiquée par la communauté scientifique.
Elle expose le jeune à des risques de radiation, puisqu'elle comprend la prise de radiographies.
D'autres moyens existent pour évaluer l'âge, tels que :
La preuve documentaire, pour laquelle il existe une présomption d'authenticité prévue à l'article 47 du Code civil ;
Faisceau d'indices dégagés par un personnel qualifié dans le cadre d'une approche pluridisciplinaire.
Amendements déposés par EELV
Il a été déposé des amendements à la loi Protection de l'enfant (discutée à l'assemblée nationale le 12 mai 2015 visant à interdire la pratique des tests d'âge osseux sur les mineurs isolés étrangers afin de les décréter majeurs et de les exclure de la protection due aux mineurs, voire de les faire condamner à des peines de prison.
Sergio Coronado, Cécile Duflot, Paul Molac et Noël Mamère députés Ecologistes demandent de façon plus large que la détermination de l'âge par des tests osseux soient interdite dans le code civil.
APRÈS ART. 4 BIS
N° CL3
ASSEMBLÉE NATIONALE
30 avril 2015
PROTECTION DE L'ENFANT - (N° 2652)
AMENDEMENTprésenté par
- Coronado, M. Molac, Mme Duflot et M. Mamère
ARTICLE ADDITIONNEL
APRÈS L'ARTICLE 4 BIS, insérer l'article suivant :
Le chapitre Ier du titre X du livre Ier du code civil est complété par un article 388-4 ainsi rédigé :
" Art 388-4. - L'évaluation selon la méthode des tests osseux ne peut déterminer la minorité d'un individu. "
EXPOSÉ SOMMAIRE
Cet amendement vise à exclure toute utilisation d'un test osseux quel qu'en soit le cadre juridique et procédural ou le motif.
Ce type d'expertise médicale est contesté sur le plan scientifique et éthique par les médecins, parce qu'ils s'appuient sur l'atlas de Greuliche et de Pyle, un outil de comparaison fait sur des populations blanches, de milieux aisés, et effectuées aux États Unis dans les années 1930.
Le Haut Conseil de la Santé Publique dans son rapport du 23 Janvier 2014 précise que " la maturation d'un individu diffère suivant son sexe, son origine ethnique ou géographique, son état nutritionnel ou son statut économique ". Et conclut : " Il n'est pas éthique de solliciter un médecin pour pratiquer et interpréter un test qui n'est pas validé scientifiquement et qui, en outre, n'est pas mis en œuvre dans l'intérêt thérapeutique de la personne. En cas de doute, une décision éthique doit toujours privilégier l'intérêt de la personne la plus fragile, en l'occurrence le jeune ".
Le Conseil National de l'Ordre des médecins rappelle dans un communiqué du 9 Novembre 2010 demande que " les actes médicaux dans le cadre des politiques d'immigration soient bannis, en particulier les radiologies osseuses. "
Il y a également une forte hétérogénéité des pratiques dans les pays membres de l'Union Européenne et aucune directive n'existe à ce niveau.
En 2009, le Comité des droits de l'enfant des Nations-unies a, dans ses observations concernant l'examen périodique de la France en matière de droits de l'enfant, noté " avec préoccupation que malgré l'avis négatif du Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé, l'Etat (...) continue de recourir à l'examen osseux pour déterminer l'âge des enfants ".
Les jurisprudences administrative et judiciaire ont relevé le peu de fiabilité de cette expertise. " La seule circonstance qu'un examen osseux ait fait apparaître un écart entre l'âge de l'enfant évalué selon cette méthode et celui résultant d'un acte de naissance ne permet pas de conclure à l'existence d'une fraude ; la détermination de l'âge par examen osseux est une expertise très contestée quant à sa fiabilité " CAA Bordeaux 11 juillet 2013, n° 13BX00428 et n° 13BX00526.
CA Lyon 26 mars 2013, n° 13/9 : " il doit être rappelé que les tests d'âge osseux, compte tenu de leur fiabilité déficiente, eu égard à d'importantes marges d'erreur, ne permettent pas de servir à eux-seuls de fondement à la détermination de l'âge d'un mineur isolé étranger ".
La CNCDH recommande fermement l'interdiction pure et simple du test osseux, en précisant que certains tribunaux de grande instance et plusieurs Etats européens, dont le Royaume-Uni, n'utilisent plus à ce jour cette méthode.
AMENDEMENT 2APRÈS ART. 4 BIS
N° CL4
ASSEMBLÉE NATIONALE
30 avril 2015
PROTECTION DE L'ENFANT - (N° 2652)
AMENDEMENTprésenté par
- Coronado, M. Molac, Mme Duflot et M. Mamère
ARTICLE ADDITIONNEL
APRÈS L'ARTICLE 4 BIS, insérer l'article suivant :
L'article 1183 du code de procédure civile est complété par un alinéa ainsi rédigé :
" Le recueil, le traitement et l'évaluation, à tout moment et quelle qu'en soit l'origine, des informations préoccupantes relatives aux mineurs non accompagnés, notamment la décision d'expertise médico-légale de détermination de l'âge, sont ordonnés par le juge des enfants. "
EXPOSÉ SOMMAIRE
Amendement de repli.L'expertise médico-légale destinée à déterminer l'âge du jeune isolé intervient trop souvent sur réquisition du parquet. Cet amendement confie au seul juge des enfants le pouvoir d'ordonner une expertise médico-légale de détermination de l'âge.
Ce type d'expertise médicale est contesté sur le plan scientifique et éthique par les médecins, parce qu'ils s'appuient sur l'atlas de Greuliche et de Pyle, un outil de comparaison fait sur des populations blanches, de milieux aisés, et effectuées aux États Unis dans les années 1930.
Le Haut Conseil de la Santé Publique dans son rapport du 23 Janvier 2014 précise que " la maturation d'un individu diffère suivant son sexe, son origine ethnique ou géographique, son état nutritionnel ou son statut économique ". Et conclut : " Il n'est pas éthique de solliciter un médecin pour pratiquer et interpréter un test qui n'est pas validé scientifiquement et qui, en outre, n'est pas mis en œuvre dans l'intérêt thérapeutique de la personne. En cas de doute, une décision éthique doit toujours privilégier l'intérêt de la personne la plus fragile, en l'occurrence le jeune ".
Le Conseil National de l'Ordre des médecins rappelle dans un communiqué du 9 Novembre 2010 demande que " les actes médicaux dans le cadre des politiques d'immigration soient bannis, en particulier les radiologies osseuses. "
Il y a également une forte hétérogénéité des pratiques dans les pays membres de l'Union Européenne et aucune directive n'existe à ce niveau.
En 2009, le Comité des droits de l'enfant des Nations-unies a, dans ses observations concernant l'examen périodique de la France en matière de droits de l'enfant, noté " avec préoccupation que malgré l'avis négatif du Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé, l'Etat (...) continue de recourir à l'examen osseux pour déterminer l'âge des enfants ".
Les jurisprudences administrative et judiciaire ont relevé le peu de fiabilité de cette expertise. " La seule circonstance qu'un examen osseux ait fait apparaître un écart entre l'âge de l'enfant évalué selon cette méthode et celui résultant d'un acte de naissance ne permet pas de conclure à l'existence d'une fraude ; la détermination de l'âge par examen osseux est une expertise très contestée quant à sa fiabilité " CAA Bordeaux 11 juillet 2013, n° 13BX00428 et n° 13BX00526.
CA Lyon 26 mars 2013, n° 13/9 : " il doit être rappelé que les tests d'âge osseux, compte tenu de leur fiabilité déficiente, eu égard à d'importantes marges d'erreur, ne permettent pas de servir à eux-seuls de fondement à la détermination de l'âge d'un mineur isolé étranger ".
La CNCDH recommande fermement l'interdiction pure et simple du test osseux, en précisant que certains tribunaux de grande instance et plusieurs Etats européens, dont le Royaume-Uni, n'utilisent plus à ce jour cette méthode.