Mansiet-Berthaud Madeleine
368 pages
Éditions Presses de la Cité (2015)
Collection Terres de France
Fin du XIXe siècle. Seule ou presque, la belle Gentiane a désormais la lourde charge de la Vouivre, l'une des plus importantes fermes de la région. Son mari Clovis, père de leur petit Joris, n'est plus. Il est tombé des fameuses « échelles de la mort » lors d'une périlleuse tentative de contrebande, pratique alors courante dans ce pays franc-comtois niché entre montagnes et forêts.
La jeune femme s'est résignée à accepter l'aide de Gildas, paysan expérimenté, qu'elle ne connaît que trop bien. En dépit de ses réticences, cette présence la rassure. Néanmoins, cette
présence la rassure. Ce qui l'inquiète, ce sont ces étranges lettres anonymes qui lui parviennent, accompagnées de bouquets de gentianes...
Extrait :
« Le cimetière ne fut bientôt plus qu'un champ de fleurs. La foule jusque-là silencieuse s'écoula vers la sortie, commentant l’événement en prenant soin de na pas hausser le ton, comme si les voix ou les propos avaient le pouvoir de réveiller les locataires de ce lieu de paix.
Quand Augustin le douanier ne vit plus âme qui vive errer parmi les allées, il entra sans bruit et se rendit devant les tombes des trois passeurs de denrées illicites. Ils n'avaient pas craint, cette nuit-là, de charger leurs épaules d'une marchandise vivante, prenant ainsi des risques inconsidérés. Leurs noms, il les connaissait. Il réalisait maintenant la portée de cette arrestation. Et pourtant, il fallait bien intervenir ! En pareille circonstance, lui et ses collègues ne faisaient qu'obéir à des ordres supérieurs. Leur métier consistait à arrêter les contrevenants à la loi, mais devant ces croix de bois plantées en terre, il ne pouvait que déplorer l'issue de l'intervention. Il serait longtemps hanté par la vue insupportable de ces corps brisés et sanglants. »
Mon avis :
En Franche Comté à la fin du XIXème, Clovis est un propriétaire fermier qui s'adonne parfois à la contrebande. Loin de le faire pour l'aspect financier, la traversée vers la frontière Suisse pour rapporter des denrées est une activité qui se fait régulièrement même si elle est illégale. Sa dernière traversée s'avère pourtant fatale. Il laisse derrière lui Gentiane, son épouse, Joris son fils et la grand-mère Amélie. La jeune veuve se retrouve désormais avec la charge de la ferme, la plus grande de la région. Un fardeau bien trop lourd pour elle. Gentiane n'a pas le temps de faire son deuil qu'elle se retrouve assaille par les difficultés pour gérer le domaine. L'arrivée de Gildas, une homme que Gentiane a éconduit dans sa jeunesse, va se révéler d'une grande utilité. Bleu Gentiane est ce qu'on appelle un roman du terroir : il met en avant la vie paysanne et l'agriculture. Mais aussi des valeurs et des traditions propres à une région. C'est ainsi qu'on découvre la tradition des gabelous, ces personnes chargées d'arrêter celles qui traversent illégalement le pays pour acheter ou vendre des produits moins cher de régions moins taxées. Les contrebandiers prennent le risque d'être condamnés à mort ou leur vie à chaque excursion. Les gabelous sont profondément détestés par les contrebandiers, mais aussi par la population comme nous le montre le récit. Ils sont montrés du doigt et dénigrés. Numa, le jeune frère de Gentiane, va devenir l'un d'entre eux.Nous évoluons donc dans une sorte de huis-clos au cœur de la campagne où les personnages vivent au fils des saisons : la période avant l'hiver où il faut faire des réserves alimentaires, la vie recluse dans son logement durant les longs mois de froid... Certains passages du roman semblent plus lents alors que le résumé laissait présager une atmosphère plus inquiétante avec la présence de lettres anonymes. En parallèle à la nouvelle vie de Gentiane, on suit Numa qui enquête sur les mystérieuses lettres et sur la mort de son beau-frère. Une lecture intéressante et qui nous fait voyager par sa simplicité.
★★★☆☆