Fleur Pellerin a donc obtenu la démission de la présidente de l’Institut national de l’audiovisuel, cette inconsciente qui a réussi à facturer à son employeur, c’est-à-dire nous, 40.915 euros de frais de taxi en dix mois. J’ai entendu une personne commentant ce scandale tenter de réduire son ampleur en prétendant que l’on avait tort d’opposer le public au privé. Selon elle, on pouvait observer le même genre de pratiques dans le privé. Je doute qu’elle ait la moindre connaissance de ce monde. Je me trompe peut-être en généralisant à partir de mon expérience personnelle mais j’incline à penser que, dans le privé, ces dépenses sont beaucoup mieux surveillées que dans le monde politique ou dans l’administration.
Dans la multinationale où j’ai travaillé durant plusieurs décennies, les différents types de ces dépenses sont répertoriés. On ne peut les déclarer que sous certaines conditions et leur montant unitaire est plafonné. Ainsi, par exemple, jamais on ne m’aurait remboursé une course en taxi pour regagner Paris depuis Roisssy étant donné que Roissybus était à ma disposition. J’ignore comment un collaborateur du public voit ses frais avancés ou remboursés mais je considère comme inimaginable qu’aucun contrôle ne soit fait sur les dépenses qu’il a engagées.
Il est ahurissant d’entendre Agnès Saal prétendre qu’il ne s’agit que d’une maladresse et vouloir rembourser ce qu’elle considère comme un trop-perçu. Le casseur qui restitue son butin n’efface pas son délit. Bien pis, lorsque l’on rappelle que la conduite des personnalités doit être exemplaire, on ne signifie pas simplement qu’elles doivent respecter la loi comme n’importe quel citoyen, mais plutôt qu’il leur faut être encore plus scrupuleuses afin de constituer des exemples.
Mme Saal avance comme excuse le fait qu’elle ne puisse faire travailler son chauffeur douze à quinze heures par jour, sous-entendant par là qu’il s’agit de son rythme de travail habituel. Permettez-moi d’en douter. Elle ajoute qu’un chauffeur lui est nécessaire, étant donné qu’elle n’a pas le permis de conduire. De nombreux jeunes ne peuvent accepter un emploi simplement parce qu’ils n’ont pas le permis exigé. Va-t-on pour autant leur payer des courses en taxi pour remédier à ce manque ?
Des individus du genre de Mme Agnès Saal se croient réellement d’une espèce supérieure, quelques coudées au-dessus du commun des mortels. Mieux que rembourser quelques milliers d’euros, il est indispensable qu’ils redescendent sur terre, qu’ils comprennent qu’ils sont des privilégiés grâce à nous et que cela leur impose de redevenir humbles et dévoués au bien commun.