Jauja est le nouveau film de Lisandro Alonso, un des chefs de file du cinéma argentin contemporain. La film commence en Patagonie, en 1882 précisément, à l'époque de l'extermination des indiens de cette région reculée du pays. Le capitaine Gunnar Dinesen (Viggo Mortensen, impeccable de bout en bout) et sa fille Ingeborg, participent à cette expédition jusqu'à ce qu'elle s'enfuie avec un jeune soldat. Le capitaine part à sa poursuite.
Jauja, une esthétique soignée et magnifique
Il y a dans Jauja un constant souci du cadrage. D'ailleurs, pour en accentuer l'importance, l'image est de format carré (comme récemment dans Mommy et dans Ida) avec les coins arrondis, comme dans les films super 8 que l'on visionnait en famille. Et dans ce cadre fixe, la caméra filme un superbe paysage dans lequel les personnages s'insèrent, agissent et disparaissent dans l'horizon infini de cette nature sauvage qui tient un très grand rôle dans Jauja. La photo est elle aussi superbe, les couleurs presque aquarellisées, ce qui donne aux scènes une beauté plastique assez réussie, comme celle où les deux jeunes amants se retrouvent et s'enlacent dans un entrelacs de roseaux. Une langueur imprègne le spectateur aux basques de cet homme absolument seul dans des immensités sans fin, des ciels orageux, des rochers inhospitaliers, les images offrant un véritable plaisir de l'œil.
Jauja, un scénario trop indigent pour que le spectateur résiste à la monotonie
Le film bifurque après trente minutes, et ce pendant plus d'une heure, sur cet homme lancé à la poursuite de sa jeune fille blonde. Il y a du western dans cette chevauchée paisible de Viggo Mortensen, étrange pour qui poursuit, dans le paysage aride où surviennent des " têtes de coco ", les indiens, maquillés bien trop grossièrement pour faire vrai. On ne peut s'empêcher d'ailleurs de penser à un film frère, La prisonnière du désert, sans en regretter les coups de théâtre et les dialogues ciselés. Là, pas ou peu de dialogue, rarement plus de deux personnes dans le champ, seuls cet homme et son cheval qui affrontent la dureté de la nature. On regrette de ne pas voir la jeune fille elle aussi, se mouvant dans les herbes et les pierres inhospitalières. Puis enfin, un rebondissement qui touche à l'hallucination puis un second qui explique davantage les quelques incohérences de cette poursuite. Mais on reste sur sa faim, on recherche du sens à Jauja, qu'un message en prologue décrit comme une région difficile d'accès où fort souvent celui qui s'y aventure se perd en chemin. Pour le spectateur, c'est mission accomplie!
Une autre critique de Jauja : http://next.liberation.fr/cinema/2014/05/20/jauja-grandeur-mature_1022705