Le collectionneur est un des maillons essentiels du marché de l’art. Dans ce marché généré par la demande au contraire des autres marchés créés par l’offre, des vendeurs, artistes, galeries, maisons de vente volontaire se retrouvent face à des acheteurs institutionnels ou privés, musées, fondations, fonds national ou régionaux d’art contemporains, collectionneurs. Les œuvres échangées sont uniques, non substituables et leur valeur économique est fondée sur la valeur artistique.
Le Département des études, de la prospective et des statistiques du Ministère de la Culture et de la communication vient de publier une étude titrée Les collectionneurs d’art contemporain : des acteurs méconnus de la vie artistique. Cette dernière a été réalisée par Nathalie Moureau, Maître de conférences à l’Université Paul-Valery de Montpellier, Dominique Sagot –Duvauroux, Professeur à l’Université d’Angers et Marion Vidal, Docteur en Sciences Economiques de l’Université de Montpellier.
L’enquête s’est déroulée pendant six mois de janvier à juin 2014 et trois cent trente – deux(332) réponses ont été collectées et croisées avec l’enquête internationale Collecting in the digital age réalisée pour AXA en 2013 auprès de neuf- cents collectionneurs (900).
Le mot collectionneur entre dans le dictionnaire en 1789. Mais qu’est – ce qu’un collectionneur ? Un « accumulateur » de timbres, de coquillages, de papillons ou de tableaux. Cette étude permet de mieux connaître cet acteur du monde de l’art souvent mystérieux et fascinant.
Il ressort de cette enquête que les collectionneurs de l’Hexagone sont en majorité des hommes (73%), souvent diplômés de l’enseignement supérieur (77 % ont un niveau bac+4 ). Soixante – quatre pour cent (64%) ont plus de 40 ans ce qui correspond généralement à la capacité financière nécessaire aux acquisitions d’œuvres. Enfin, comme les galeries d’art, la majorité des collectionneurs (47%) est domiciliée en Ile de France. L’environnement familial reste déterminant et le plus souvent, ils commencent à collectionner entre 20 et 30 ans (43%).
Collectionner exige un investissement certes financier mais aussi personnel. Il faut y consacrer du temps. Les amoureux de l’art y consacrent l’essentiel de leur temps de loisirs : visiter les ateliers, foires, galeries ; se documenter et échanger avec les artistes ….
L’importance des collections varient de 50 pour 23% à plus de 200 œuvres pour 21%. Les différentes techniques se côtoient car les collections ne sont pas spécialisées. La peinture domine dans les collections ( 90 %), suivie par la sculpture ( 74%)à part égale avec la photographie ( 74%), enfin le dessin (73%), la gravure( 59%),le livre (49%), la vidéo( 27%), l’installation (20%). Elles sont en général conservées à domicile. Un quart environ (27 %) expose sur leur lieu de travail, 8% seulement dispose d’un lieu spécifique dédié à leur collection. 27 % ont aménagé une réserve.
Le budget annuel moyen consacré aux acquisitions s’échelonne de moins de 2000 €/an pour 10% à plus de 50 000€/an pour 16%. 21% dépensent entre 10 000 et 20 000€. 48% investissent une somme équivalente à un ou deux mois de leur revenu annuel et 26% un montant supérieur à deux mois de leur revenu annuel.
Le collectionneur d’art n’est pas un simple acquéreur. C’est un maillon déterminant du marché de l’art qui opère du côté de la demande par ses acquisitions mais aussi du côté de l’offre à travers son engagement dans la vie artistique. Il peut passer des commandes à des artistes, participer à la production d’œuvres importantes, financer des catalogues, prêter des œuvres pour des expositions, assister financièrement des plasticiens ou les faire bénéficier de son réseau. Au même titre que les musées, les foires et les biennales, le collectionneur est une instance de légitimation de l’art. Entrer dans une grande collection médiatique est un passeport pour la réussite.
Quels sont les mobiles à l’origine de l’engagement des collectionneurs ? L’étude en distingue quatre. Une forme d’altruisme, le désir de soutenir création et créateurs. Le plaisir esthétique et artistique personnels procuré par cette activité. La recherche d’un positionnement, d’une reconnaissance sociale. Enfin, un enjeu économique et financier ; la collection est alors un investissement.
Pour terminer, une typologie des collectionneurs est dressée : collectionneur quasi professionnel, collectionneur investi, collectionneur pondéré, collectionneur indépendant.
Pour en apprendre davantage, n’hésitez pas à consulter cette enquête claire et instructive.
Pour ce qui concerne la Martinique et la Caraïbe , la revue ARTHEME avait publié des interviews de collectionneurs ainsi qu’un un dossier sur le sujet pour mieux connaître les pratiques locales. Collectionner en Caraïbe, voilà une recherche à actualiser et à approfondir.