Ancien d’Etalab, avec Plume Labs, Romain Lacombe œuvre pour que les questions de la qualité de l’air et plus généralement, de l’environnement s'intègrent au quotidien des citadins, via l’Internet des objets.
Un innovateur ?
Diplômé de l’École polytechnique et du MIT au sein duquel il a effectué des recherches dans le champ du développement durable, Romain Lacombe ne cumule pas les diplômes pour sa gloire personnelle, sa démarche s’inscrit dans une volonté de « proposer des solutions et de nouveaux modèles pour répondre aux défis de ce monde ».
Cela passe d’abord par le fait d’inciter les gouvernements à ouvrir leur données aux citoyens. En 2011, il co-fonde la mission Etalab portant sur l’open data, pour laquelle il va œuvrer pendant 4 ans; un programme qui est aujourd’hui placé sous l’autorité du Premier ministre. « Avec l’open data, on rend accessible aux citoyens et aux innovateurs les données publiques pour faire émerger des projets entrepreneuriaux ». L’esprit d’entreprise l’a d’ailleurs contaminé. Cette envie de lui-même s’engager l’a conduit à fonder Plume Labs.
Une innovation ?
Plume Labs se présente comme « une technologie qui permet de savoir exactement ce qu’on respire ». Dans un premier temps, dans l’idée de « construire une communauté autour de cette problématique », les internautes de plus de 60 villes à travers le monde dont Paris, New Delhi et Shanghai ont pu accéder au « Plume Air Report », une sorte de météo rapportant heure par heure le niveau de pollution dans ces zones urbaines, couplée à des recommandations sur le moment idéal pour sortir faire son jogging ou emmener ses enfants au parc. Cette plateforme web, bientôt disponible sur support mobile, est le fruit de l’agrégation de données issues d’instituts publics.
Mais l’ambition de Plume Labs touche aussi l’Internet des objets. Romain Lacombe martèle que « la pollution change d’instant en instant. Un degré de pollution peut tout à fait différer d’un bout à l’autre d’une même rue ». Ce data scientist au service de l’environnement souhaite donc développer un objet connecté qui permettra de collecter en temps réel, grâce à des capteurs, des données sur la qualité de l’air qui entoure le porteur de cet objet . « Cela se rapproche en quelque sorte du quantified-self. On passera de la mesure de la pollution comme phénomène, à la mesure de la pollution comme expérience ». Ce qui soulève la question de définition de mesure de la pollution. Mesurer la pollution, qu’est ce que cela signifie concrètement ? Romain Lacombe relève qu’il existe quatre principaux agents polluants qui ont un impact sur la santé dont les particules fines et les gaz polluants.
Être en mesure de prédire le niveau de pollution dans les heures qui suivent en se basant sur la science des données, pour une meilleure santé, voilà aussi un des buts de Plume Labs.
L'appli Plume Labs Report disonible sur Android à la mi-mai
Quels impacts ?
En 2012, l’Organisation mondiale de la santé révélait le chiffre accablant de 7 millions de décès prématurés liés à la pollution de l’air. « La pollution de l’air est un enjeu de santé majeur, elle est en effet plus meurtrière, à l’échelle internationale, que le tabac. Ce n’est pourtant pas une fatalité. Nous pensons qu’avec un meilleur accès à l’information, on peut tous mieux se protéger contre la pollution et mieux vivre en ville ». Les recommandations que délivre la plateforme participent d’ailleurs à cette volonté de se prévenir des risques liés à la pollution.
Et il semblerait que le sujet intéresse bon nombre de personnes à travers le monde, pour preuve, le succès des Plume Air Reports et les nombreuses interactions via les comptes Twitter propres à chacune des villes couvertes par ces rapports.
Les récents pics de pollution à Paris continue également de prouver que l’enjeu d’informer les citoyens est réel.
Extreme pollution (176) at 12PM. Usual for #NewDelhi.Avoid breathing if you are in Connaught Place http://t.co/vbhXEYZxBh #Airpocalypse
— Air Report New Delhi (@PlumeInNewDelhi) 22 Avril 2015
Et à l’avenir ?
Dans quelques semaines, l’application mobile sera lancée sur Android. Le grand chantier à venir pour Plume Labs sera de s’inviter dans les maisons et « amener l’Internet of Things au service de l’environnement. On passe la plupart de notre temps en intérieur, sans pour autant savoir ce qu’on y respire vraiment, c’est un problème méconnu ».
Et si le pari n’était pas également de « boucler la boucle » ? Que l’open data à l’échelle des gouvernements permettent à ceux-ci d’avancer concrètement sur les enjeux du réchauffement climatique ? La suite ne devrait pas tarder à arriver, avec la tenue de la COP21, conférence sur le climat à Paris… D’ici là, c’est bien l’open data, fer de lance de Romain Lacombe, qui pourrait nous permettre à tous d’être armés face à ces enjeux tout comme permettre à la France d’être un acteur clé sur le marché de la santé connectée. « L’open data est presque un sujet de souveraineté aujourd’hui. La France doit être capable de se positionner parmi les pays qui développent des plateformes industrielles dans ce domaine, d’où l’importance de faire en sorte que le patrimoine informationnel riche dont dispose notre pays soit un véritable socle sur lequel des chercheurs, des innovateurs et des entrepreneurs puissent bâtir les modèles de demain ».