Un film de Rob Epstein et Jeffrey Friedman (2014 - USA) avec Amanda Seyfried, Peter Sarsgaard, Robert Patrick, Sharon Stone, Juno Temple, Chris Noth, Bobby Cannavale
Flippant.
L'histoire : 1970. Linda a 21 ans et vit chez ses parents, très religieux, qui la surveillent de près. Elle tombe amoureuse de Chuck, un type cool, dans l'air du temps, qui lui répète inlassablement qu'il l'adore. Ils se marient et Linda se rend compte peu à peu que le bar qu'il gère cache des activités illicites, notamment la prostitution. Et justement, l'argent vient à manquer. Il lui demande d'accepter une ou deux passes. Puis il veut la faire tourner dans un film porno, une industrie qui paie bien, dit-il, et il connaît des gens bien placés. Elle hésite, puis elle accepte. C'est pour son homme. Et puis tout le monde autour d'elle se livre à une sexualité débridée. C'est la mode, c'est Peace and Love tous les jours...
Mon avis : Un film qui n'est certes ni un chef d'oeuvre ni une oeuvre d'art (on dirait plutôt un téléfilm), mais qui a le mérite de nous raconter une histoire vraie, et de nous rappeler que le cinéma pornographique, que l'on voudrait nous faire croire "propre" et tout à fait "normal", cache bel et bien de très sombres personnages dont les victimes sont les femmes.
On nous relate régulièrement, et c'est possible, je ne suis pas allée vérifier, que les acteurs aiment leur métier, qui leur permet d'assouvir des besoins sexuels démesurés. Ou bien que les salaires sont attractifs et qu'ils n'ont pas d'états d'âme particuliers. Soit.
C'est exactement ça que nous montre le film dans sa première partie. Nous voyons une jolie jeune femme, plutôt pudique, naïve, et très amoureuse, qui, pour aider son mari sans le sou, accepte de tourner un porno, car il connaît du monde dans ce milieu. Ce sont les années 70, la libération sexuelle, tout ça... alors le porno, pourquoi pas ? Elle rencontre un succès phénoménal avec son premier film, Gorge profonde, et devient une star du jour au lendemain. La belle vie.
Puis ellipse. Six ans plus tard. Linda a quitté Chuck et elle veut écrire son autobiographie, pour raconter comment ça s'est vraiment passé. Et nous voyons alors une histoire effrayante, sordide, où elle aurait pu mourir sous les coups et les viols...
Edifiant. Je repenserai toujours à ce film, et à cette femme, lorsqu'on tentera de me dire à nouveau que le cinéma porno, ça ne fait de mal à personne.
Amanda Seyfried est remarquable, très jolie et infiniment touchante. On lui a mis des lentilles marron pour qu'elle ressemble à la vraie Linda. Ca fait un peu drôle, elle que l'on connaît avec un immense regard bleu azur... mais ça lui va bien. Peter Sarsgaard est tout aussi excellent. Gentil paumé au début, il devient une brute ignoble, avec un naturel remarquable. Sharon Stone est méconnaissable, et parfaite ! A noter dans de tout petits rôles James Franco, Chloë Sevigny, Eric Roberts...
Et pour ceux qui ont peur du trash, il n'y a quasiment pas de scènes torrides. Tout est dans la suggestion.
Lovelace a fait un bide chez nous. Je ne comprends pas qu'il ait connu un tel échec : 4700 entrées ! C'est vrai que ce n'est pas le film du siècle, loin de là, mais c'est très pédagogique. Et quand on voit tout ce qui se passe aujourd'hui, avec la condition des femmes qui semble régresser, y a donc du boulot. Rien que pour ça, il aurait été bon que les gens se déplacent. Ca ne les intéresse donc pas ? C'est grave... A moins que les critiques ne les aient dégoûtés. Et ça aussi c'est grave... Surtout quand ils déclarent (je l'ai souvent lu)... que ça manque de sexe ! Ils n'ont strictement rien compris, ceux-là... Des gros beaufs.
Si quelques uns, rares, vantent ses qualités et ses défauts, de façon objective, pour la majorité, le film est un navet. C'est dommage. Il est important de montrer l'envers du décor et que les amateurs de porno soient éclairés sur leur contribution à la dévalorisation de la femme, pire à un certain esclavagisme sexuel. Le sujet fait peur, autant aux producteurs qu'aux spectateurs. J'aurais trouvé sympa d'encourager davantage cette tentative.
Sachez que Gorge profonde a rapporté 600 millions de dollars et que Linda Lovelace a été payée... 1250 dollars (et je ne compte pas les coups et le reste...). Un salaire que son mari a de toutes façons empoché à sa place. Linda n'a jamais retravaillé dans le porno et a écrit un livre pour raconter son histoire. Pendant tout le reste de sa vie (elle est décédée à 53 ans), elle s'est battue contre la pornographie et pour la condition féminine.