Katmandou, samedi dernier I ©Prakash Mathema / AFP
Le séisme de magnitude 7,8 a été provoqué par la rupture d'une grande faille, qui a généré des ondes d'autant plus fortes qu'elle s'est produite rapidement, en une centaine de secondes environ. Cette faille est un pan incliné long de quelque 150 km et large d'environ 50, allant jusqu'à 15-20 km de profondeur, qui est bloqué et se débloque par morceaux à chaque séisme. La rupture qui a démarré au nord-ouest de Katmandou, puis s'est propagée vers l'est, sur une centaine de kilomètres, s'est produite à l'endroit où convergent deux plaques tectoniques bien connues des sismologues, celle qui porte l'Inde, au sud, et l'eurasienne, au nord, note l'Institut américain de géophysique (USGS). "La plaque indienne remonte à une vitesse de l'ordre de 2 cm par an vis-à-vis du Tibet, et essaie de passer sous le plateau tibétain", explique Jérôme Vergne, sismologue à l'Observatoire des sciences de la terre de Strasbourg. "Or cette remontée ne se fait pas de manière continue mais par saccades. Là on a eu une très grosse saccade, c'est-à-dire une rupture brutale de l'interface de la faille qui sépare ces deux plaques".
Il faudra s'attendre à des répliques dans les mois, "voire les années", qui viennent. Le pan de faille ne s'est pas rompu de manière homogène, de petites zones peuvent encore générer des séismes. "A priori la partie superficielle, au sud de Katmandou, n'a pas cassé, ce qui veut dire que la zone n'est pas complètement déverrouillée par ce séisme", explique Pascal Bernard, sismologue à l'Institut de Physique du globe de Paris, pour qui "dans les années qui viennent ce sera une période sensible". Les répliques devraient continuer, en diminuant (nombre et intensité). "Mais on a observé dans le passé des répliques à forte magnitude, pouvant même aller jusqu'à la magnitude du choc principal", affirme Jérôme Vergne, qui rappelle qu'une réplique de 6,7 comme celle de dimanche matin est un très fort séisme, "surtout dans une zone où les constructions ont été fragilisées par un premier choc". Ensuite, les failles se recimentent, elles "oublient", et reprennent leur rythme, tandis que la compression des plaques se poursuit.Cette convergence de continents, à l'origine même de la chaîne de l'Himalaya, a crée une région où le risque sismique est l'un des plus forts au monde, dotée de failles colossales, avec de très longs plans inclinés pouvant créer de grandes zones de contact. "A une échelle de quelques dizaines à quelques centaines d'années, on sait qu'il y aura de nouveau des séismes majeurs dans la zone himalayenne, qui pourraient même dépasser la magnitude de celui-ci", affirme M. Bernard. La zone est comprimée, et se relâche par petits morceaux, qui impriment des contraintes de part et d'autre jusqu'à ce qu'au bout de quelques siècles ça finisse par casser. "Imaginez un élastique que vous tendez, il va finir par casser", explique Pascal Bernard. Parmi les derniers très gros séismes enregistrés -participant au rapprochement des plaques- figure celui qui avait frappé l'est de Katmandou en 1934. Le précédent dans cette zone remontait à 1255. En revanche la partie ouest du pays n'a pas connu de très forts séismes depuis 1505. "On pense que les séismes peuvent être d'une magnitude supérieure à 8,5 voire 9, mais l'échelle de temps est mal connue à 200 ans près. Oui "le pire" est à venir, mais ça peut être dans quelques mois comme dans quelques siècles."FG