Je me suis tue, de Mathieu Menegaux

Par Lacritiquante

C’est avec curiosité que j’ai découvert, grâce aux éditions Grasset, le premier roman de Mathieu Menegaux qui est sorti au début du mois : Je me suis tue. C’est le récit franc et dur de la vie d’une femme qui a basculé de la pire des façons qu’il soit.

Claire est emprisonnée à Fresnes. C’est de là-bas qu’elle nous écrit, elle nous livre son histoire qu’elle n’avait révélé encore à personne, l’histoire qui la conduite derrière les barreaux, l’histoire qui explique et dénonce tout. Cette histoire qu’elle a enfermé à double tour dans son cœur, muettement, pour essayer de la faire disparaître.

Il est arrivé à cette femme un crime odieux, innommable. Elle a essayé de s’en défaire, de l’oublier, pour éviter les ennuis, les problèmes, les répercussions qui viendraient encore la hanter. Elle a préféré subir pour rapidement étouffer ces événements, les faire taire. Mais il faut croire que la vie n’avait pas envie de lui laisser ce choix-là. Claire avait voulu porter ce fardeau seule, sans en faire part à personne. Mais quand celui-ci revient dans sa vie avec force, l’obligeant à lui faire une place, alors tout son environnement bascule, et c’est l’inexorable descente aux enfers qui commence. Et Claire va craquer, elle va commettre cet acte inqualifiable et inexplicable aux yeux de son mari, de sa famille, du monde entier. Et même là, elle fera le choix de rester cloîtrée dans un mutisme sans faille.

Le récit qu’elle nous livre ici est son dernier témoignage, où elle dit tout, ne cache rien : ce qui s’est passé, les raisons de son silence, ses espoirs que tout s’arrangerait. Ses derniers mots, car après tout, entre « je me suis tue » et « je me suis tué », il y a peu d’écart.

Je sais que ce résumé ne décrit pas vraiment le contenu de ce roman, mais je ne veux pas vous spoiler. Ce que je peux, par contre, vous avouer, c’est que ce n’est pas un livre à lire quand on va déjà mal. Ce qui est décrit ici est dur, met mal à l’aise, voire en colère. A coup sûr, ça ne vous laissera pas indifférent. Malgré la douleur resentie pour le personnage, le lecteur ne peut s’empêcher de tourner les pages de ce calvaire, pour savoir quelle fin il a eu.

Ce n’est pas un roman joyeux, mais c’est tout de même un roman à découvrir, et à lire. Car écrit de très belle manière, avec justesse, sans fausse tristesse, sans alourdir le trait. On a vraiment l’impression que c’est Claire, que c’est la victime qui a écrit ces mots, et on est d’autant plus gêné que l’empathie entre le lecteur et ce personnage se crée avec une facilité déconcertante. J’ai été très étonnée de voir que c’est bien un homme qui a écrit ce récit, car il a réussi à saisir tous les enjeux, toutes les nuances de la féminité et des autres côtés de la femme.

Un très beau livre, même si le thème est vraiment dur. Je vous conseille donc de bien choisir le moment où vous allez entamer cette lecture (vraiment), car cela paraît tellement réel que vous risquez bien d’en pâtir, mais cela ne doit pa vous empêcher de lire un jour ou l’autre ce roman bouleversant, intense.

Mathieu Menegaux, Je me suis tue, éditions Grasset, 16€50.