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Le beau Simon

Publié le 25 avril 2015 par Dubruel

~~d'après BOMBARD de Maupassant

Simon Bombard, Grand, gros, beau gars, Le teint fleuri, L'œil bleu, gai et bête S'habillait d'amples habits, Avec une élégance tapageuse De provincial en fête, Il riait, criait, gesticulait et étalait Sa bonne humeur orageuse. Il passait sa vie à bambocher. Le long de la plage, il se promenait, Cherchant une femme.

Il pensait : ''Que diable, dans le tas De celles qui viennent là, Je finirai bien par trouver mon affaire'' Et il cherchait avec un flair De chien de chasse, un flair de Normand, Sûr qu'il trouverait, Celle qui le ferait Riche, rien qu'en le voyant. Un samedi soir, Croisant le regard D'une Anglaise Tenant son chien en laisse, Elle avait de longues dents Et une chevelure rousse au vent, Il lui jeta un coup d'œil enflammé, Un coup d'œil qui disait : ''Me voilà !''. Elle fit tomber son ombrelle. Il la ramassa Et la lui remit : -" Madame, permettez... " Puis s'enhardissant : -" En voilà du beau temps. Voulez-vous vous promener ? "

À la fin de l'été, leurs amis recevaient Ce billet de faire-part : M. et Mme Prosper Bombard Ont l'honneur de vous faire part Du mariage de M. Simon Bombard, Leur fils, avec Mme veuve Kate Rupard. Mme veuve Kate Rupard A l'honneur de vous faire part De son mariage avec M. Simon Bombard. La fortune de la mariée S'élevait à quinze mille francs. Simon lui a réclamé Quatre cents francs Mensuels Pour sa cassette personnelle. En échange, il dut prouver Que sa tendresse les méritait. Bombard s'en acquitta facilement Et obtint la somme qu'il demandait. Tout alla bien dans les premiers temps. Kate se montrait charmante, Envoûtante, affriolante.

Mais Bombard rapidement se lassa Des baisers conjugaux. Comme il avait de quoi S'en offrir de plus longs, de plus gros, Il devait bientôt s'en payer à satiété. Il conçut un vrai plan De rusé Normand. Il engagea Une bonne qu'il prépara Avec soin à ses projets. C'était une gaillarde rouge et râblée Qui n'éveillerait point les soupçons. D'ailleurs, Kate l'accepta avec confiance. Mais pour se dérober à sa surveillance Simon dut user de mille précautions Et affronter d'incroyables difficultés Il y parvenait par-ci par-là, pendant De courts instants Mais sans réelle tranquillité.

Pour pallier La complexité De cette situation, il trouva une duperie Qui a parfaitement réussi. Kate se couchait toujours de bonne heure Tandis que Simon partait jouer aux dés Avec ses copains du Grand Café. Il ne rentrait chez lui qu'à onze heures. Maïté l'attendait Dans l'entrée. Il ne se donnait que cinq minutes Car il redoutait d'être surpris. Mais, enfin, ces quelques minutes Suffisaient à son ardeur. Il glissait un louis Dans la main de la soubrette ...Et le bonheur De ficher Kate dedans équivalait À ce qu'avait d'imparfait Sa conquête.

Un soir, Maïté ayant eu une attitude Plus vive, plus animée que d'habitude. Simon lui rendit ses hommages Pendant dix minutes ou davantage... Mais quand dans sa chambre il monta, Kate n'y était pas. Il en eut froid dans le dos. Elle apparut enfin : -" Où donc vous étiez ? " Lui demanda-t-il, l'air inquiet. -" À la cuisine, je buvais un verre d'eau. " Simon se rassura.

Mais le lendemain, au petit-déjeuner, Kate tendit un louis à Maïté Et d'un ton sérieux, prononça : -" Voilà vingt francs, ma fille, tené ! Hier après-midi, je vô en avé privé. "

Bombard ouvrit sur sa femme des yeux ahuris...


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