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Auteur : Amy EngelCycle: The Book of Ivy
Édition : LumenParution : 2015
Pages : 342Prix : 15 €
Genre : SF, Jeunesse
V
oilà cinquante ans qu’une guerre nucléaire a décimé la population mondiale. Un groupe de survivants d’une dizaine de milliers de personnes a fini par se former, et ce qui reste des États-Unis d’Amérique s’est choisi un président. Mais des deux familles qui se sont affrontées pour obtenir le pouvoir, la mienne a perdu. Aujourd’hui, les fils et les filles des adversaires d’autrefois sont contraints de s’épouser, chaque année, lors d’une cérémonie censée assurer l’unité du peuple.
J’ai seize ans cette année, et mon tour est venu.Je m’appelle Ivy Westfall, et je n’ai qu’une seule et unique mission dans la vie : tuer le garçon qu’on me destine, Bishop, le fils du président. Depuis ma plus tendre enfance, je me prépare pour ce moment. Peu importent mes sentiments, mes désirs, mes doutes. Les espoirs de toute une communauté reposent sur moi. Le temps de la rébellion approche…Bishop doit mourir. Et je serai celle qui le tuera.
H
onnêtement, j'ai lu déjà pas mal de dystopies en young adult et même si c'est toujours sympa à lire, je suis rarement surprise par ce genre dernièrement, parce qu'il reprend inlassablement les mêmes codes, les mêmes schémas, voire les mêmes personnages, et qu'il implique toujours une romance, parfois peu convaincante. En fait, ce qui démarque une dystopie young adult d'une autre, c'est l'originalité de l'intrigue et du sujet (lorsqu'il sort un peu des schémas classiques), le style d'écriture (celui-ci est souvent simple et peu travaillé, donc un style un peu plus abouti peut vite faire la différence) ou les personnages (quand on accroche vraiment aux personnages, en général on peut passer au-dessus d'une tonne de défauts^^).
Je dois avouer que je n'en attendais pas trop de ce roman, même si j'en avais lu de très bonnes critiques avant de me lancer. Et pourtant, je ressors de ma lecture à un doigt du coup de coeur. Bon, là, à froid, plusieurs semaines après, le coup de coeur s'est un peu éloigné, mais je reste sur le sentiment d'un excellent roman du genre.
Pourquoi ça ? Tout simplement grâce à Ivy, un personnage auquel je me suis vite attaché, qui ne ressemble à aucun autre, et qui selon moi évite les défauts et les caricatures qu'on retrouve souvent dans ce genre de romans. Car Ivy n’est pas une jeune fille particulièrement douée, belle ou intelligente. Certes, ce n’est pas un laideron ni une cruche, mais la seule chose qui semble la démarquer des autres, c’est sa famille : son grand-père a été le grand rival du combat (d’abord idéologique, puis physique) qui a opposé les Westfall et les Lattimer. Manque de bol, c’est la famille d’Ivy, les Westfall, qui ont perdu. Depuis, la ville est séparée en deux, et la paix est maintenue via des mariages arrangés entre les descendants de chaque famille, dès lors qu’ils atteignent l’âge de 16 ans.
En fait, le background est assez classique avec une catastrophe écologique qui a mené les humains à leur perte, une ville coupée du monde extérieur et entourée d'une clôture, les criminels étant expulsés par-delà la barrière, c’est-à-dire une mort assurée. L’originalité réside justement dans les mariages arrangés qui sont censés préserver la paix mais qui ne sont pas présentés comme des mariages idylliques, loin de là (ce qui détonne un peu par rapport à d’autres dystopies). L’accent est beaucoup mis sur l’inégalité hommes/femmes, sur la perception du mariage et sur la liberté.
Cette année-là, c’est justement au tour d’Ivy de se retrouver mariée… mais pas avec n’importe qui : c’est de Bishop Lattimer qu’elle devient la femme, l’héritier du président en place et rival de sa famille. Et pourtant, le regard qu’Ivy pose sur Bishop va rapidement changer : il n’est pas du tout celui qu’elle avait imaginé… Bishop est un peu trop parfait à mon goût (même s’il y a un passage en particulier où il fait carrément flipper), et il m’a beaucoup fait penser au fils de l’Elector dans Legend de Marie Lu. En fait, je l’ai surtout apprécié pour deux choses : son ouverture d’esprit, qui permet à Ivy de se poser des questions et d’ouvrir les yeux sur sa propre famille, et sa relation avec Ivy.
Car oui, sur fond de dystopie, The Book of Ivy est avant tout une romance dans la veine de Roméo et Juliette (l’auteur y fait référence dans le roman, et certains éléments sont clairement un clin d’œil à l’œuvre de Shakespeare). Bishop et Ivy sont deux jeunes ados qui se découvrent dans leurs premiers émois amoureux, mais ils sont surtout de véritables amants maudits, et c’est cet aspect que j’ai trouvé poignant et qui m’a beaucoup plu.
J’ai aussi beaucoup aimé l’aspect psychologique du roman : Ivy a une relation particulière avec sa famille et avec Bishop, elle ne sait pas toujours faire la différence entre ses sentiments et le rationnel, elle se sait manipulée mais ne sait plus qui croire. Ce sont ces doutes et ces sentiments très forts (peur, amour, peine, colère…) qui rendent Ivy si humaine et si attachante, et qui font de ce roman une vraie réussite. C’est bien simple : il est difficile de décoller le nez du roman, et j’avoue être impatiente de lire la suite !
Malgré une intrigue et un univers classiques pour une dystopie young adult, The Book of Ivy a su me surprendre de manière très positive : l'idée des mariages arrangés afin de garantir la paix permet à l'auteur de développer des réflexions intéressantes et assez différentes de ce que j'ai pu lire jusqu'à présent. Mais ce qui fait de ce livre un excellent roman du genre, c'est surtout la psychologie des personnages, et particulièrement celle d'Ivy. Sans oublier la romance, dans la veine de Roméo et Juliette, qui fait vivre au lecteur quelques moments intenses en émotion :) The Book of Ivy surfe sur un genre exploité à outrance ces dernières années et parvient pourtant à captiver le lecteur du début à la fin : voilà une preuve que la dystopie YA a peut-être encore de belles heures devant elle !
9/10
17/48
14/20
un paysage ravagé