Existait naguère une maison, un manoir art déco, qui appartenait à l’une de mes tantes, une riche veuve. Elle possédait un bar avec des palmiers, un jardin d’hiver, une superbe volière.
Et sur les cendriers – Ah oui, tout n’est pas poétique ! – des lieux communs, des maximes, telle celle-ci que j’ai gardée en mémoire : Le Bon Dieu envoie souvent des culottes à ceux qui n’ont pas de derrière !
La grande maison se prolongeait par une propriété, avec des animaux, des canards et des cygnes, des étangs, des pelouses, des buissons où l’on se cachait, un immense potager et des serres surchauffées en été.
Une partie de mes dimanches d’enfance s’est passée dans ce décor, tandis que les adultes évoluaient dans un autre monde, parlant d’argent, de problèmes, de tant de choses pratiques.
Au fond du parc, d’une façon étrange, par-dessus les murs, on entendait des sons bizarres, caractéristiques des films de cinéma : du piano, des dialogues, des bruits. Accoté au mur, en effet, on avait construit une salle de cinéma « Le Paris ! ». Quand il faisait chaud, le projectionniste ouvrait la fenêtre et me parvenait la bande sonore.
Pris à la gorge
Par les voix irréelles
C’est une respiration
Qui élargit l’horizon
Sur la buée de l’âme
S’inscrivent des noms
S’étoilent
Des musiques étranges
Au pied du mur
Emprunter le passage
Taché de soleil
Qui se déroule et se prolonge
Mais toujours le même ange
En larmes et souriant
Ecartant les fougères
Sous le même ginkgo
Éternel
Alors qu’importe
A ton regard émerveillé d’enfant
Les nuits de lune rousse !