On appelle otage, une personne dont on s'empare et qu'on utilise comme moyen de pression contre quelqu'un pour l'amener à céder à des exigences, nous dit le Petit Larousse. Le lecteur qui tombe dans les rets du filet tendu par un écrivain de best-sellers, ne devient-il pas l'otage de celui-ci, permettant à l'écrivain de pouvoir exiger une revalorisation de son contrat avec son éditeur ?
Ne vous est-il jamais arrivé de tomber sous la coupe d'un écrivain, de best-sellers ou pas d'ailleurs, et de vous sentir quasiment obligé de lire tous les bouquins qui paraissent sous son nom ? Cette addiction, dans les cas extrêmes, peut même n'être pas motivée par le talent d'écriture de l'auteur ! Ca arrive, je le sais. Prisonnier de ce bourreau vous guettez ses apparitions dans les médias, vous consultez les articles qui lui sont consacrés dans la presse, vous attendez son prochain roman avec l'impatience du nouveau converti, la parole de son gourou. Fort de ses troupes de lecteurs, otages sans résistance ayant succombé au syndrome de Stockholm, l'écrivain peut se prévaloir de ventes importantes et de royalties conséquentes.
Certains otages s'échappent parfois. Après de longues années de captivité virtuelle, une prise de conscience subite autant qu'inespérée, une critique particulièrement sensée et argumentée lue quelque part, ou un faux pas du kidnappeur avec un bouquin vraiment trop bâclé, et c'est l'étincelle qui vous sort de votre aveuglement complice. Ces cas de délivrance existent, mais ils sont rares. L'écrivain est malin, quand il vous a ferré, il est très difficile ensuite de lui échapper, après deux ou trois romans ingurgités, vos chances de fuite sont pour ainsi dire nulles.
Le lecteur vit une dangereusement, on ne le dira jamais assez.