J’ai été familier de la nuit.
Je suis sorti sous la pluie — et revenu sous la pluie.
J’ai marché plus loin que le plus lointain réverbère.
J’ai discerné le plus triste chemin de la ville.
Je suis passé devant le veilleur à son poste
Et ai baissé les yeux, réticent à expliquer.
Je suis resté immobile et ai arrêté le bruit de mes pas
Quand au loin un cri interrompu est parvenu
Au-dessus des maisons depuis une autre rue,
Mais pas pour me rappeler ou me dire au revoir,
Et encore plus loin à une hauteur surnaturelle,
Une horloge lumineuse sur fond de ciel
A proclamé que l’heure n’était ni mauvaise ni bonne
J’ai été familier de la nuit.
*
I have been one acquainted with the night.
I have walked out in rain—and back in rain.
I have outwalked the furthest city light.
I have looked down the saddest city lane.
I have passed by the watchman on his beat
And dropped my eyes, unwilling to explain.
I have stood still and stopped the sound of feet
When far away an interrupted cry
Came over houses from another street,
But not to call me back or say good-bye;
And further still at an unearthly height,
One luminary clock against the sky
Proclaimed the time was neither wrong nor right.
I have been one acquainted with the night.
***
Robert Frost (1874–1963) – Le ruisseau qui coule vers l’ouest (West-Running Brook, 1928) – Traduction de Tomasz Akszterowicz