Mini Monk
MUDDY MONK
IPANEMA
Tout commence par une respiration. Une profonde inhalation qui sonne comme une invitation à rentrer dans l’univers onirique de l’album. Un monde moite aux couleurs chaudes, une plage de sable fin, et des filles rêvées aux noms mélodieux qui se répètent "Lisa, Léa, Lola…" jusqu’à perdre leur consistance et se fondre dans la musique. Sublimes, insaisissables, fantômes idéalisés et intemporels.
Monk se définit comme un rêveur. Son second album Ipanema en est tout imprégné. Ca sent l’amour du sud, la bossa, les synthés 70ies et aussi une certaine envie de danse ainsi que des collaborations entre garçons romantiques aux voix graves et nostalgiques.
On frôle le kitsch. Mais on aime s’y plonger comme dans un cocon. C’est un album de salon, un disque qui emplit une pièce, se goûte et laisse planer ses vapeurs.
Lorsque qu’on s’attable pour en discuter, Muddy Monk est encore tout pris par l’angoisse qui accompagne la sortie de son second disque. Le premier, il l’avait fait tout seul, empaqueté dans des pochettes maison et vendu aux enchères à son entourage. Pour Ipanema, le projet a pris une autre dimension. Pour la première fois, Muddy Monk sort de véritables chansons. Il se dévoile. Fébrile, Muddy décrit les différentes phases de sa création comme une succession de trois échelons : la phase créative, la phase de production puis la sortie. "Le fait de sortir un produit que l'on va montrer aux autres biaise la phase de production. On perd un peu de spontanéité. Et une pression peut prendre le dessus sur le plaisir de la création simple et récréative.". A la vue de son Ipanema tout bien construit, succession narrative de morceaux en quarante minutes tout pile, on décèle effectivement un certain perfectionnisme qui a tout pour devenir obsession.
D’ailleurs, l’album est aussi hanté de l’intérieur. Comme Gainsbourg dans Melody Nelson, Muddy Monk a sa Birkin. La voix de Noémie Schmidt accompagne ses balades. Il l’a engagée dans l’aventure lors d’une soirée alors qu’il ne l’avait jamais entendue chanter : "On m’avait dit qu’elle avait une belle voix. Quand je l’ai vue je savais que c’était elle. Si tu n’idéalise pas un peu la fille ça ne peut pas marcher. En tout cas pour moi.".
Une autre collaboration "de rêve" a aussi eu lieu avec Ichon, un parisien. Ils se sont écrit avant de se retrouver. "Ca a tout de suite collé, on est sur la même longueur d’ondes.". C’est Ichon qui donne à la deuxième version de "Ruines" tout son sens avec cet entêtement à répéter sans cesses les paroles de la première apparition du morceau (féminine, avec la voix de Noémie) : "La nuit qui berce nos ruines adoucit ma peine, …. ".
Ipanema, c'est aussi un essai poétique : "Ecrire ses premières chansons, ça n'est pas facile, on remarque dans mes premiers titres que le texte est un peu moins étoffé, il y a juste quelques mots. Par la suite j'ai gagné en confiance ce qui m'a permis d'écrire des texte plus long". Un cheminement artistique sur lequel il s'épanche volontiers, mi-sérieux, mi-ironique, dans cette vidéo réalisée par un poteau :
Ah ! le topos de l'artiste seul, torturé, romantique ! C'est le récif sur lequel se fonde Ipanema. Album d'une rupture, amoureux, un peu naïf. Il se balance au gré des boucles répétitives qui bercent vers une transe douce. Sans craindre le kitsch, Muddy Monk signe là un premier disque plutôt prometteur.