Tempête dans un cerveau
Après avoir connu la gloire avec son rôle de super héro dans « Birdman », Riggan a connu une traversée du désert médiatique. Là, il décide de se relancer en adaptant, produisant et jouant dans une adaptation d’une pièce de théâtre. Passé du cinéma commercial au théâtre est un challenge casse gueule surtout qu’il est hanté par son rôle à succès.Inarritu est un cinéaste à dispositif complexe, au point que dans ses films, ses choix techniques finissent parfois par cannibaliser le propos. Ici, il démontre une maitrise technique incroyable avec son film aux apparences de plan séquence unique. Inarritu nous met le nez dans le guidon durant 2 heures, c’est haletant et suffocant. Truqueur, même si de longs plans séquences existent tout de même (aucun raccord plan visible), les ellipses sont astucieuses aussi. Virtuose. Etouffant, cloitré dans les coursives et les loges du théâtre, la caméra se ballade en continu dans ce labyrinthe ; parabole de la psychologie de Riggan. Cette mise en scène frénétique poussant le spectateur à la limite de la surcharge visuelle comme une démonstration de son savoir faire, Inarritu laisse un peu en plan son scénario. On a très vite compris l’histoire de rédemption du has been ; et la mise en scène finit par épuiser d’autant plus que le scénario s’essouffle et tourne en rond. Inarritu a décidé d’allumer Hollywood, Broadway, le star system et la célébrité issue des réseaux sociaux. Tout cela comme un bulldozer : la critique est une harpie, les comédiens sont soit sociopathes soit névrosés et sont néfastes pour leur entourage, le spectacle est un monde d’’egocentrique, le conflit entre Art (le théâtre d’auteur ici) et Commerce (les blockbusters ciné ici) ; la fulgurance de la célébrité par le Net et la difficulté de percer avec un vrai talent,… Bien sûr qu’il y a énormément de vérités dans tout cela, mais çà manque tellement de subtilité ; caricature et clichés à tous les niveaux… Autant par le passé il y a eu des critiques d’Hollywood talentueuses par Altman ou dans le célèbre « Sunset boulevard » ; ici, Inarritu semble aigri. Répétitif aussi, son scénario plat tourne à vide malgré la surenchère des thèmes abordés en surface seulement.Après une mise en scène enlevée, l’autre intérêt majeur du film est le casting époustouflant avec en tête Keaton bien entendu mais aussi Edward Norton… et surtout toutes les scènes où ils se retrouvent en face à face.Donc les 4 Oscars sont peut être généreux… Excepté celui du meilleur réalisateur pour la performance.
Sorti en 2015