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Balzac journaliste. Articles et chroniques choisis et présentés par Marie-Eve Thérenty, GF Flammarion, chronologie bibliographie, index, 2014, 400 p., 9, 80 €
Balzac fut un homme de presse. Son activité littéraire, hybride, fut partagée entre journaux et romans. La Comédie humaine emprunte beaucoup à ses articles, à ses romans-feuilletons, aux faits divers. Le journalisme est partout présent dans son œuvre. Des journalistes, pourtant, il dira que ce sont des "rienologues" et ses ouvrages ne manquent pas de diatribes contre les journalistes. On se souvient que TF1 a diffusé une longue fiction biographique consacrée à Balzac en automne 1999 qui montrait ses débuts dans la presse.
Le travail de Marie-Eve Thérenty, professeur de littérature à l'université de Montpellier, spécialiste des rapports entre presse et littérature, rééquilibre l'image classique de Balzac, celle que l'on enseigne en classe, celle que colportent les outils scolaires. Le romancier fait une large place au journaliste. A cette époque, la presse prépare au roman, "le petit journal" étant "le premier atelier d'écriture de la monarchie de Juillet".
L'auteur est une remarquable historienne de la presse et son anthologie est précédée d'une présentation minutieuse ; on y suit la carrière journalistique de Balzac, du "petit journal" aux "grandes revues" où il prépublie ses romans. On y suit aussi son évolution politique et surtout la genèse de son œuvre littéraire : "une grande partie de l'œuvre balzacienne s'est inventée dans la presse, qui a constitué par bien des aspects le creuset de la Comédie humaine" estime Marie-Eve Thérenty ; selon elle, "l'hybridation entre l'œuvre journalistique et littéraire est la caractéristique la mieux partagée des écrivains du XIXe siècle".
Praticien de la presse, journaliste, directeur de journal, Balzac s'avère un théoricien et un sociologue des médias, ce dont témoigne sa "Monographie de la presse parisienne" (1843).
Les articles et chroniques réssemblés dans l'ouvrage sont classés et regroupés d'après leur genre journalistique : les "petits journaux", la caricature, le fait divers, les revues, les "Lettres sur Paris" et "Balzac défenseur des artistes et des écrivains". Regroupement commode, certains de ces textes n'étaient pas faciles à trouver.
Comme pour tous les ouvrages de cette collection (Baudelaire, Gautier, Hugo, Zola), nous sommes en présence d'un excellent outil de travail et de culture, qu'il s'agisse d'histoire littéraire ou d'histoire des médias. Et le travail de Marie-Eve Thérenty multiplie les raisons de lire et étudier Balzac.