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"Dessins d’ombre" ou traces d’une disparition

Publié le 16 avril 2015 par Lifeproof @CcilLifeproof

« Certains objets ont le pouvoir de susciter des pensées, des rêves, des songes, et par là des œuvres… L’art comme un essai de retrouver en songes ce qui a disparu, ce qui ne cesse de disparaître à chaque instant… » déclare l’artiste mulhousienne Véronique Arnold. Née à Strasbourg, cette plasticienne autodidacte présente un panel d’œuvres, empreintes de poésie et de légèreté, à voir jusqu’au 31 mai prochain au Musée des Beaux-Arts de Mulhouse.

Véronique Arnold et Edmondo Woerner, Emily s'anime, installation de fils noirs et d'une robe de soie grise, 2015 Photo Caroline Megel

Véronique Arnold et Edmondo Woerner, Emily s'anime, installation de fils noirs et d'une robe de soie grise, 2015. Photo: Caroline Megel

Intitulée Dessins d’ombre, cette exposition met en valeur des installations, au support très divers, en lien avec des personnages historiques importants du XIXe siècle. Elle débute au centre de l’escalier par une œuvre, créée en collaboration avec l’artiste suisse Edmondo Woerner. Il s’agit d’une sorte de toile d’araignée noire, qui emprisonne en son sein une robe grise. Semblable à celle portée par la poétesse américaine Emily Dickinson, dont les écrits prolifiques ont été publiés en grande partie à titre posthume, cette tenue très austère est reproduite une nouvelle fois à l’étage par la costumière Carole Birling. L’écrivain a beaucoup inspiré Véronique Arnold. En effet, une salle lui est consacrée, dans laquelle nous retrouvons une troisième robe, flottant dans un coin de la pièce et dont le tissu est recouvert de ses vers poétiques. La création de broderie relie toutes ces œuvres hétéroclites.

Salle Emily Dickinson, oeuvres de Véronique Arnold Photo Caroline Megel

Salle Emily Dickinson, œuvres de Véronique Arnold. Photo: Caroline Megel

Que ce soit pour représenter la trace du corps ou pour reproduire un texte, le fil matérialise une disparition. Cette approche est évidente lorsque nous pénétrons dans la salle intitulée Dibutade, en référence à un texte de Pline l’Ancien dans Histoire naturelle. Celui-ci écrit qu’ « …en utilisant lui aussi la terre, potier Butadès de Sicyone inventa le premier l’art de modeler des portraits en argile ; cela se passait à Corinthe et ce fut grâce à sa fille, qui était amoureuse d’un jeune homme ; comme il partait pour l’étranger, elle entoura avec des lignes l’ombre de son visage projeté sur un mur par la lumière d’une lanterne ; sur ces lignes son père appliqua de l’argile et fit un relief et, l’ayant fait sécher, il mit à durcir au feu avec le reste de ses poteries… ». Par le biais d’un fil noir, l’artiste restitue la trace du corps, précédemment déposé sur un tissu duveteux ; des œuvres similaires aux Anthropométries de l’époque bleue d'Yves Klein.

Outre les textes empruntés de la littérature ou de la science (ceux des naturalistes Charles Darwin et Alexander von Humboldt), Véronique Arnold réunit des objets provenant des collections d’instituts en les intégrant dans ses œuvres brodées. Nous pouvons citer la machine à écrire et l’armoire du Musée Historique de Mulhouse, les minéraux de l’École de Chimie, les coraux du Musée d’Histoire Naturelle de Colmar, des épées du Musée Unterlinden à Colmar et de la Mairie de Sausheim… De plus, le choix des matières est fondamental. En effet, le bois, le lin, les objets collectés ont tous une histoire et provoquent une réminiscence d’un passé plus ou moins lointain.

Salle Dibutade, oeuvres de Véronique Arnold, empreintes peintes, broderies de fil noir sur textiles, 2014 Photo Caroline Megel

Salle Dibutade, œuvres de Véronique Arnold, empreintes peintes, broderies de fil noir sur textiles, 2014. Photo: Caroline Megel

Chaque pièce est surprenante : la boîte d’œillets sur la structure métallique tel un tabouret sur lequel nous ne pourrions pas nous asseoir, la sphère en branchages noirs d’un volume considérable tout en étant frêle dans sa composition… Le mélange des arts et de la science est inattendu ; l’artiste s’inspire de tout ce qui l’intéresse. L’exposition est une sorte d’introspection, car ses expériences sensibles alimentent ses œuvres. Nous sommes au cœur de sa pensée, de son univers onirique, des traces laissées par son enfance et ses découvertes. Véronique Arnold redonne une nouvelle existence à ce qui a disparu.

Caroline.

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Exposition Dessins d’ombre jusqu’au 31 mai 2015

Musée des Beaux-Arts, 4 place Guillaume Tell à Mulhouse

Ouvert tous les jours de 13h à 18h30

Fermé les mardis et les jours fériés

Entrée libre


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