Le rover Curiosity, qui explore depuis deux ans et demi le cratère Gale et maintenant les pentes du mont Sharp, a découvert du perchlorate de calcium, un type de sel qui abaisse le point de congélation et forme une saumure. Une équipe de chercheurs estime qu’étant donné les conditions météorologiques qui règnent la nuit dans cette région et aussi au petit matin en hiver, de l’eau liquide pourrait s’infiltrer dans le sol de Mars. Jadis couverte d’océans et de lac, la Planète rouge pourrait bien cacher des poches d’eau sous sa surface.
Comme nous l’avons vu il y a encore quelques jours, il y aurait des milliers de glaciers sur Mars qui stockent sous sa surface une part non négligeable de ses réserves d’eau restante. Oui restante, car une étude publiée en mars dernier estime qu’il y en avait environ 6,5 fois plus qu’aujourd’hui, dans sa jeunesse, voici plus de 4 milliards d’années. La planète devait alors être couverte d’océans et donc, teintée de bleu. Hélas, avec la disparition de son champ magnétique, son sort a basculé : les rayonnements solaire et cosmique ont progressivement dégradé son atmosphère, ce qui a eu pour effet d’assécher sa surface et la transformer en l’astre rouge que nous observons à présent… Il y a donc toujours de l’eau sur notre voisine située en moyenne à 220 millions de km du Soleil, mais la question que continue de se poser les planétologues et, avec eux, le grand public : est-ce qu’il y en a à l’état liquide ?, et si oui, dans quelle proportion ? Est-ce que Mars la rouge demeure habitable ?
Pour tenter d’y répondre, les chercheurs disposent, sur place, du merveilleux robot-géologue Curiosity de la mission Mars Science Laboratory (MSL). Celui-ci, débarqué en août 2012 dans le grand cratère Gale (155 km de diamètre), près de l’équateur martien, a récemment détecté la présence dans le sol de perchlorate de calcium, un sel qui a la faculté d’abaisser le point de congélation de l’eau. « (…) Dans de bonnes conditions, il absorbe la vapeur d’eau dans l’atmosphère », rappelle Morten Bo Madsen qui dirige le groupe Mars à l’institut Niels Bohr de l’université de Copenhague et a co-signé l’étude qui vient d’être publiée dans Nature à ce sujet. Le professeur agrégé poursuit : « Nos mesures effectuées avec la station météo de Curiosity montrent que ces conditions existent au cours de la nuit et juste après le lever du Soleil en hiver. D’après les mesures de l’humidité et des températures à 1,6 m de hauteur puis à la surface de la planète, on peut estimer la quantité d’eau qui est absorbée. » Une partie de cette vapeur d’eau est condensée pour former du givre « mais le perchlorate de calcium est très absorbant et créé une saumure avec de l’eau qui abaisse le point de congélation, ainsi le givre devient liquide ». Comme le sol de Mars est poreux, l’eau s’y infiltre et « au fil du temps, d’autres sels peuvent aussi se dissoudre et lorsqu’ils sont liquides, ils peuvent se déplacer et précipiter ailleurs sous la surface ».
Un exemple de dépôts sédimentaires dans le cratère Gale, photographié ici à « Hidden Valley » par Curiosity
Dans ces circonstances, il est très tentant de supposer qu’une activité biologique puisse exister dans le sous-sol de Mars, mais, comme le rappellent les scientifiques, la Planète rouge est aujourd’hui un milieu hostile, sec, glacial et sans cesse bombardé de rayons cosmiques qui sont en mesure de détruire toutes formes de vie (du moins, comme celles que nous connaissons), et cela même à un mètre de profondeur. Pour ce qui est du passé, il est encore trop tôt pour y répondre.