Alors bien entendu lors de ce marathon comment ne pas remarquer fixé sur des pagnes le dossard n°64173 qui jure quelque peu avec celui des 54 000 coureurs du marathon de Paris. Ce dossard appartient à la gambienne Siabatou Sanneh, venue spécialement de son pays natal pour l'occasion. Loin d'accomplir un exploit sportif, c'est surtout pour sensibiliser les foules aux problèmes d'accès à l'eau en Afrique que Siabatou a fait le déplacement. Le bidon d'eau sur la tête, vêtue de pagnes, la gambienne déambule d'un pas assuré sur le bitume parisien. Une scène peu ordinaire qui n'a pas manqué d'attirer l'attention des spectateurs parisiens. Son message peut se lire sur deux pancartes qu'elle a attaché sur ses épaules: "En Afrique, les femmes parcourent chaque jour cette distance pour de l'eau potable".
Siabatou Sanneh est dans les rues de Paris pour nous dire combien les africains sont fatigués. Elle avait expliqué, avant le départ, les contraintes qu'enduraient les africains, spécialement les femmes, pour avoir accès à l'eau. "Chaque jour, on va chercher de l'eau et c'est très loin". Elle et ses filles doivent quotidiennement parcourir une longue distance pour subvenir aux besoins en eau de sa famille. Une tâche qui se transmet de génération en génération, " depuis que je suis née, j'ai vu mes parents faire ça, je le fais, et je montre à mes enfants " raconte t-elle à l'AFP. Des kilomètres parcourus parfois pour rien " l'eau n'est pas très bonne et les enfants tombent malades, ont des diarrhées à cause de l'eau ". Cette course c'est avant tout pour "s'aider elle-même, aider sa famille et son village" car " les africains sont fatigués ". Il s'agit aussi de " montrer le contraste entre l'opulence et la beauté de Paris comparé à la pauvreté de l'Afrique ", a déclaré à l'AFP Sheryl Greentree, fondatrice de l'ONG Water for Africa.
Une participation hautement symbolique qui est l'œuvre de l'ONG britannique Water for Africa qui a lancé une campagne de collecte de fonds (www.themarathonwalker.com l'internaute peut suivre le nombre de kilomètres que Siabatou Sanneh doit parcourir avant de franchir l'arrivée) pour financer des pompes à eau à Bullenghat, où vit Siabatou Sanneh, et dans d'autres villages. Selon l'ONG " la construction d'un puit de pompage requiert 4.900 euros et peut être monté en cinq jours ". A ce jour plus de 120 projets de puits ont été financés en Gambie. Il faudrait "entre 200 et 300 pompes à eau en Gambie pour approvisionner les populations et ainsi pallier aux 40 à 60% de puits ou systèmes de pompage qui tombent en ruine". De quoi intéresser, le 7e forum Mondial de l'eau qui s'ouvre aujourd'hui à Daegu, en Corée du sud.
Demain quand tous les habitués du footing matinal, dominical ou de fin de soirée sur le bitume de nos cités ou dans nos parcs et jardins, entreprendrons ce rituel de santé et d'entretien corporel s'accompagnant de sa panoplie gageons qu'ils auront une pensée dans leur acte auto ego sanitaire pour ces millions de femmes qui s'épuisent dans ces marathons pour l'eau, cette ressource indispensable à la vie.