Les notes de la mousson de Fanny Saintenoy 3,75/5 (07-04-2015)
Les notes de la mousson (120 pages) sort le 9 avril 2015 aux Editions Versilio.
L’histoire (éditeur) :
Kanou, un petit prince choyé par tous, grandit dans la douceur et les couleurs de Pondichéry, mais quand sa mère, Galta, remonte le fil de son passé, elle découvre les vestiges d'un secret de famille qui va menacer le monde idyllique de son fils. Seule Angèle, à Paris, connaît l'histoire douloureuse qui les lie tous les trois, une vérité sombre qui changera leurs destinées. Après le succès de "Juste Avant" (prix de la Plume d'argent), Fanny Saintenoy explore les liens qui unissent des personnages en quête d'identité à travers plusieurs générations.
Mon avis :
Quand le livre débute il est question de mariage dans le quartier chrétien de Pondichéry, un événement en principe festif et heureux. Sauf que l’entrée des mariés à l’église se fait dans la plus grande intimité. Personnes n’assiste à la cérémonie et sur la trentaine d’invités, seulement 2 sont présents au dîner. La jeune femme enceinte doit annoncer le lendemain sa grossesse à la servante Ahmma, qui se réjouit déjà de cette nouvelle (« cet enfant, une lueur qui éclaire nos chemins. » Page 19).
Qui est donc ce couple et l’enfant à venir…l’auteure reste très mystérieuse à ce sujet et poursuit ensuite son récit sur l’histoire de Kanou, un enfant de presque 10 ans élevé par cette même Ahmma. Son père, surnommé Bapu, est un violoniste célèbre toujours en tournée et sa maman Galta, une femme tendre mais souvent lointaine. Kanou est un enfant choyé, un petit prince solitaire qui ne manque de rien, si ce n’est de réponses, car son enfance est marquée par un vide qu’il est grand temps de combler : l’histoire de sa famille. C’est Angèle, gardienne dans une école du IVème à Paris qui apportera les réponses à ses questions et éclairer aussi bien le passé de Galta que toutes nos interrogations.
Les notes des moussons est un texte d’une grande beauté. Court mais efficace, il est chargé de douleur, de mélancolie et au final en même temps tellement lumineux. La filiation, la différence (le gouffre des castes est tout juste évoqué mais pèse lourd sur les événements), l’acceptation et l’amour sont les thèmes porteurs de ce roman servi par une écriture exotique qui donnerait envie de faire un petit tour en Inde, où la française Angèle se sent tellement chez elle.
« La lettre de Galta a fait resurgir mille impressions reliées à mille souvenirs et Angèle ne parvient à rien maîtriser. L’Inde lui revient en plein cœur, comme un boomerang lancé avec les dernières forces retenues, des flots de sensations délicieuses et perturbantes. Jusqu’ici elle réussissant à circonscrire les montées de nostalgie. Quand l’Inde la taraudait de trop, elle montait à la gare du Nord et traînait le long des boutiques de saris et d’encens. (…) Angèle se faisait régulièrement une piqûre de rappel, c’était agréable et très frustrant à la fois. Malgré tout elle y retournait en se disant : certains vont au bar, moi, ma petite faiblesse, tel un joueur de flûte, me ramène vers le nord indien de Paris. » Page 55
« Parfois elle se dit que si on la trouvait ainsi on la ferait interner dans un hôpital avec un service spécial pour malades du pays, avec des infirmières exotiques…un service pour les chagrins de l’exil. » Page 56
J’ai été surprise par ce roman aussi bien dans ses révélations qui petit à petit parviennent au lecteur jusqu’à une fin qui frappe fort et submerge d’émotions (on comprend alors pourquoi l’auteur a choisi de ne plus orienter son récit sur le couple de départ). 120 pages c’est court pour ce genre de roman. Et même si ce n’est pas ici un défaut j’aurais quand même eu envie d’en avoir plus, que l‘histoire de cette famille soit plus creusée, que la psychologie plus étoffée et profiter aussi tout simplement de la beauté de l’écriture.
« Le filtre des baisers cicatrisait toutes les morsures. » Page 114