Une autre forme de fuite en avant : la Chine en 2009-2010.

Publié le 19 mai 2010 par Loïc Abadie

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La situation de l'économie chinoise est très différente de celle des USA : Des ménages qui épargnent beaucoup (jusqu'à 30% de leurs revenus), un pays qui produit et exporte également beaucoup et réalise de larges excédents commerciaux dans ses échanges avec les USA et l'Europe.

C'est en quelque sorte un miroir inversé des économies américaines et européennes.

Bien entendu il est normal qu'une économie émergente en pleine croissance ait une part d'investissement bien plus élevée que des économies matures. Mais depuis 2 ans, la croissance chinoise ne repose quasiment plus que sur l'investissement et ce n'est évidemment pas sain lorsque ces investissements se mettent à produire sans débouchés.

Le fond du problème est expliqué en détail dans ce rapport du blog " chinabubblewatch ", dont je recommande vivement la lecture.

Concrètement, la Chine a été confrontée en 2008 à une chute des exportations vers ses clients traditionnels (Europe et USA notamment). Et comme son marché intérieur n'était pas capable de compenser cette chute, il y avait risque de surcapacité.

Comment le gouvernement a réagi face à ce risque de surcapacité ?

Elle a bien fonctionné jusqu'ici puisque la croissance chinoise a accéléré pour atteindre 11,7% au T1 2010.

Mais comme pour toute fuite en avant, il y a un prix à payer : Les investissement récents ont de fortes chances de ne pas offrir une rentabilité suffisante faute de débouchés, et les prêts consentis pour les réaliser risquent de ne pas pouvoir être remboursés.

La rentabilité des nouveaux investissements (2009) a ainsi été déjà divisée par plus de 2, avec un ratio " ICOR " (Voir les graphiques en page 2 du de chinabubblewatch) qui est passé de 3 à 7 (il faut beaucoup plus d'argent pour obtenir le même bénéfice d'un investissement) et les taux d'utilisation des usines sont en forte baisse.

Que risque-t-il de se passer à présent ?

- De nombreuses défaillances sur les emprunts associés aux investissements non rentables.

- Une forte pression sur les salaires (les nouveaux investissements étant peu rentables, les entreprises seront obligées de comprimer au maximum la masse salariale pour tenter de résister tant bien que mal), qui réduira la capacité des salariés à consommer et augmentera encore en retour le risque de surproduction (à moins de trouver des débouchés miraculeux à l'exportation, ce qui semble peu probable vu le contexte).

Cette expansion explosive continue en 2010, avec une hausse de 21,9% des crédits en avril 2010 (comparé à avril 2009) et d'après Chinabubblewatch, la taille de la bulle de crédit en Chine serait désormais comparable avec sa grande sœur japonaise de 1991.

On retrouve bien entendu une bulle immobilière associée à cette expansion du crédit, amplifiée par certains facteurs spécifiques à la Chine, avec des niveaux de valorisation encore plus élevés que ceux des USA d'avant-crise.

Et là aussi, les premiers signes de retournement apparaissent déjà (tout va plus vite en Chine, l'implosion des bulles aussi !).

Vu l'expansion exceptionnellement rapide de cette jeune bulle de crédit et d'investissements en Chine, un scénario de hard landing (crise de surproduction et implosion de la bulle immobilière) devient tout à fait envisageable.

Il renforcerait évidemment beaucoup les pressions déflationnistes exercées par le crédit crunch en cours aux USA et en Europe, en particulier sur le secteur des matières premières, parce qu'un tel scénario est actuellement totalement écarté par le consensus qui mise au contraire sur la poursuite d'une croissance rapide en Chine.

Un dow à 3000, un baril sous les 30$ et un indice CRB sous les 150 points ?