Voilà trois ans que la manifestation " tous à l'opéra " est proposée en France, et même en Europe, sans que jamais ses programmation n'aient suscité mon intérêt. Les activités se limitaient, semble-t-il, à des visites très superficielles des salles d'opéra, sans bonus ni coulisses. Non que je juge la manifestation complètement inutile - si elle fait rentrer dans les salles de simples curieux, on ne peut que s'en réjouir -, mais elle ne semble pas devoir apporter grand-chose à ceux qui connaissent déjà les salles, et jugent la musique plus importante que les lieux.
Consacrer une journée chaque année à l'opéra est une entreprise louable, mais la concentrer sur les lieux et non sur la musique - dans la très grande majorité des théâtres qui participent à l'opération, on n'entendra pas une note de musique du week-end, en tout cas pas en présence des simples passants.
Ce n'est donc pas dans les salles d'opéra mais à la télévision que cette journée d'ouverture trouve son accomplissement. Passons rapidement sur France Télévisions qui se contente de rediffuser tard dans la nuit le très moyen Cavalleria Rusticana de Mascagni aux Chorégies d'Orange l'an dernier avec Roberto Alagna, et qui avait déjà à l'époque fait l'objet d'une diffusion en direct, et d'un reportage de pure promotion consacrée à la marraine de l'opération cette année, Béatrice Uria-Monzon. Une rediffusion tard dans la nuit, un documentaire publicitaire, on n'est pas à la hauteur du partenariat que France Télévisions prétend avoir noué avec la manifestation.
Sur Arte en revanche, il y a ce week-end de quoi découvrir. D'abord en remettant à l'honneur une initiative qui dès sa première mise en œuvre en septembre 2008 avait suscité un profond intérêt : la mise en scène de la Traviata de Verdi en direct (à l'époque) à de la gare de Zurich semble parfaitement adaptée à l'objectif de ces journées " tous à l'opéra ". Une volonté de faire sortir l'opéra de ses lieux habituels, pour provoquer une rencontre avec un public non-initié. Le résultat est saisissant d'intelligence, et illustre à merveille ce que pourrait être une véritable ouverture de l'art lyrique, qui ne saurait se limiter à une visite patrimoniale des lieux de spectacle. De voir cette gare, lieu de passage par excellence, de bousculades, investie par la musique, de voir les gens pressés s'arrêter, parfois longuement, à la fois médusés et séduits par ce qui se passe sous leurs yeux, voilà qui fait sans aucun doute beaucoup plus pour la popularisation de l'opéra que d'ouvrir les salles.
A cela s'ajoute un hommage bienvenu à José Van Damme, dans un de ses plus grands rôles auquel il fera ses adieux en direct sur Arte samedi 8 mai au soir, en direct du théâtre de la Monnaie, celui du Don Quichotte de Massenet. Moins propice à la popularisation, mais non moins intéressant, le Don Giovanni expérimental proposé par Paul Ouazan, exploration visuelle qui alterne des plans très serrés, des mosaïques, des images de coulisses, de l'orchestre, tout cela sur la musique de Mozart.
Les journées " tous à l'opéra " ont encore à évoluer pour apparaître comme de véritables opération d'ouverture et pas seulement d'opérations de simples opérations de communication. Mais on doit déjà de féliciter de voir des opéras grand public envahir les écrans de télévision pendant deux jours, à des horaires plus accessibles. Il n'y a plus qu'à espérer que les audiences d'Arte donneront des idées à France Télévisions.
" Tous à l'opéra ", journées européennes de l'opéra, les 8 et 9 mai 2010.