Dans un article paru en janvier 2011 (voir plus bas), l'auteur de ces lignes analysait la révolution tunisienne, la première du genre, comme une révolte contre la vie de plus en plus difficile des classes populaires et moyennes. Deux ans et demi plus tard, il faut bien constater que cette analyse était exacte.
Parties de Tunisie, les révoltes font le tour de la Méditerranée, dans le sens contraire de l'aiguille d'une montre. Elles en sont maintenant à la Turquie, où vont-elles continuer? Dans quel pays? Sur quel continent? Après le mouvement mort-né des indignés d'Europe occidentale, la révolte brésilienne se révèle d'une autre ampleur.
On assiste à une mondialisation, à une globalisation de la révolte qui, peu à peu, s'étend et révèle de nouvelles convulsions, dans de nouveaux pays. Il s'agit bien des symptômes d'une maladie globale qu'il faut essayer ici de comprendre:
-si les étincelles varient (le coût des transports au Brésil, un mouvement écologique local à Istanbul, ...), c'est toujours l'accroissement des tensions autour du coût de la vie et de l'accès aux ressources de base qui déclenche le processus et explique son extension.
-ce phénomène se double d'une généralisation de la défiance et de la colère contre le personnel politique. Celui-ci n'est plus crédible car il se révèle incapable de proposer des solutions viables et efficaces.
L'exemple récent le plus spectaculaire est celui de la dégringolade accélérée du parti de Beppe Grillo. Le Mouvement 5 étoiles avait obtenu 163 sièges de députés et de sénateurs aux élections législatives de février dernier. Il a connu une véritable dégringolade aux élections communales du mois de mai. Les propositions révolutionnaires et spectaculaires se sont perdues dans des querelles de personnes et des polémiques qui ont déçu des citoyens à la recherche d'une alternative qui leur permette de trouver des solutions à la crise.
Il en est de même avec François Hollande qui, sitôt élu, a mécontenté des électeurs qui attendaient une baguette magique dont il ne disposait pas. Son discours sur le retour attendu de la Croissance ne parvient plus à convaincre la société française.
Aujourd'hui, les démocraties sont condamnées à l'innovation, à l'inventivité si elles veulent éviter les maux concomitants du populisme et de la dégringolade économique. Le personnel politique doit veiller à n'agir que dans une seule direction: celle de la recherche aux solutions économiques durables à une Crise globale qui perdure et s'installe dans une société à bout de souffle.
Et cela est vrai en France, comme dans le reste de l'Europe et dans le reste du monde. Tous les pays, avec leur histoire propre et leur contexte particulier sont confrontés au même problème: une crise globale, profonde et structurelle.
Pour aller plus loin: L'entrelacement des crises économiques et écologiques
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"C'est la troisième erreur de nos élites : elles négligent l'élargissement et le creusement du phénomène de pauvreté.
Le symbole de la Révolution tunisienne n'est-il pas la baguette de pain brandie dans les manifestations?
Nos analystes, aux vies confortables, négligent le processus en cours sur l'ensemble de la planète : la vie des pauvres gens devient de plus en plus difficile. Le coût des denrées de base, alimentaire particulièrement, ne cesse d'augmenter.
Des "experts", prisonniers de leurs préjugés, nous expliquent que ces augmentations sont conjoncturelles, liées à la spéculation. Elles ne veulent pas considérer que, partout sur la planète, la densification des populations va de pair avec la raréfaction des ressources alimentaires. Erosion et artificialisation des sols, épuisement des ressources minières et des stocks de poisson, pollution et concurrence pour les espaces se conjugent pour accroître les tensions entre les populations. Les plus pauvres, plus fragiles, en paient généralement le prix les premiers.
Or, ces populations fragiles sont bien davantage politisées et éduquées que les gueux des siècles précédents. Le développement concordant de l'éducation, de la santé et des médias les ouvrent aux convulsions de la planète. Malthus n'est pas loin mais d'une manière bien différente de celle qu'il imaginait."
L'article en entier: Tunisie, pourquoi nous nous sommes trompés?