Pulsion invoquante et expressivité musicale : l'écoute musicale, une « prière » athée ?
(Séminaire musicanalyse - 23 novembre 2002)
b[ « La musique, ce langage parfait qui peut tout nommer, n'étant point signe, dirait-on, mais le secret des choses, leur prière » ]b Alain Badiou (Almagestes, 1966)
Argumentaire
Comment la catégorie lacanienne de « pulsion invoquante » peut-elle éclairer la corrélation de trois thèses : l'une sur le son musical comme trace, l'autre sur l'expression musicale comme adresse, et la dernière sur l'écoute musicale comme rapport constituant ?
Après avoir dégagé la spécificité en musique des sons et de l'expression, on explicitera la structure de l'écoute musicale en ruban de Möbius (son dehors lui revient comme un dedans) en construisant une formalisation très simple : celle d'un taquin circulaire à trois places engendrant l'incessant tourbillonnement de six configurations.
L'interprétation musicale de cette formalisation mettra en jeu le triangle d'un public, d'un musicien et d'une œuvre sous l'hypothèse qu'en musique écouter veut dire : x écoute y s'adressant à z.
Cette interprétation sera ensuite mise à l'épreuve d'un autre modèle : celui de la prière chrétienne (avec sa trinité du fidèle, de l'Église et de Dieu). On en déduira la formule possible d'une « prière athée » (sans intersubjectivité) comme étant la plus conforme à celle de l'écoute musicale.
Un examen du livre d'Alain Didier-Weil (Les trois temps de la loi) permettra alors de mesurer la proximité entre cette structure moebiussienne de l'écoute musicale et celle de la pulsion invoquante (cette quatrième pulsion - après les pulsions orale, anale et scopique - introduite par Lacan en 1963-1964 puis « oubliée » dans la suite de ses séminaires).
On conclura sur l'hypothèse d'un essentiel inamour entre musiciens et analystes, chacun demandant ce qu'il a déjà à qui ne lui offre rien, inamour stimulant un possible « transfert » entre disciplines…
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