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Careful with that Axe, Eugene

Publié le 04 avril 2015 par Adamantium

Peut-être avez-vous vu le dernier film publicitaire pour le déodorant parfumé AXE BLACK ? Je ne sais pas vous, mais en ce qui me concerne j’ai des tics nerveux au coin de l’œil à chaque fois qu’arrive sa chute…

Axe (Lynx dans d’autres pays) appartient au groupe Unilever. C’est une marque qui se vend, non pas pour son efficacité anti-odeurs ou antibactérienne, mais pour sa fragrance. Depuis 1983, elle a construit son succès mondial sur une communication franchement décalée (« the Axe effect ») qui prétend qu’en s’aspergeant de ce produit, on fait tomber les filles comme des mouches. Littéralement. Grâce à cette stratégie, Axe / Lynx ne cesse de gagner des parts de marché, de voir sa popularité croître parmi les 15-25 ans et de remporter régulièrement des récompenses dans les festivals de films de pub internationaux.

Ce dernier film montre toutefois une rupture par rapport aux précédents. Si la stratégie de fond est toujours la même (on vend le parfumage plutôt que l’efficacité), fini le second degré : pour la première fois, un déo vendu dans la grande distribution revendique qu’il est « créé par les plus grands parfumeurs au monde ».

Pour expliquer cela, on a un film qui emprunte à peu près à tous les autres films de la parfumerie en s’ouvrant sur un discours en voix off façon La vie est belle avant de nous montrer un jeune cool style Hugo et de s’achever sur un plan final à la « Inevitable » mâtiné de « What else ? ». Un sacré collage. Mais surtout, il y a ce geste à la fin

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Ce geste où le protagoniste du film se vaporise du déodorant sur le t-shirt et le poignet (??) et qu’il frotte ensuite vigoureusement ses deux poignets l’un contre l’autre. Ce geste dont tous les professionnels de la parfumerie vous disent qu’il ne faut JAMAIS le faire car il casse les molécules du parfum. Voilà donc un film qui nous explique que le parfum Axe Black est créé par les meilleurs parfumeurs au monde et qui, l’instant d’après, démolit ce qu’il vient de dire en montrant le geste typique de quelqu’un qui, justement, ne connaît rien au parfum.

J’imagine qu’au moment de créer ce spot deux logiques se sont affrontées : celle du professionnel qui sait qu’on ne doit pas frotter sa peau après s’être parfumé et celle du publicitaire qui s’est demandé quel était le geste que la plupart des gens qui constituent sa cible faisaient à ce moment-là. C’est bien entendu la seconde logique qui a gagné.

Pourtant, en dépit de cette grossière contradiction, ce film publicitaire s’adresse de la bonne façon à sa cible et peut-être que, d’une certaine façon, il prépare la clientèle de la parfumerie fine de demain : Axe se vend auprès de cette frange de la population masculine qui pense qu’on se parfume avec un déodorant, une population qui est très loin des parfums de niche et même des eaux de toilette de grandes marques. Dans cette population-là, Axe Black s’adresse à ceux qui ont envie de se parfumer de façon « subtile et raffinée », un progrès par rapport aux fragrances tue-mouches qui constituent l’essentiel de la gamme de cette Marque.

Alors, bien sûr, je fais des bonds sur mon canapé quand arrive ce spot… Mais je me dis que parmi les clients de cet Axe Black, il a des hommes à la recherche de fragrances de meilleure qualité qui deviendront peut-être un jour des consommateurs de belle parfumerie. Des hommes qui, d’ici là, auront appris qu’on ne frotte pas ses poignets l’un contre l’autre après s’être parfumé.

Hervé Mathieu

PS : Le titre de cet article est une référence à un morceau instrumental de Pink Floyd sorti en 1968.



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