Rooms. Il semble en fait que le réseau social dévoilé par Facebook en octobre 2010 se soit fraîchement inspiré de Room, réseau social français lancé par son cofondateur, Frank-David Cohen de l'entreprise française Room Inc., qui a créé LE premier salon virtuel de discussions privées sous iOS.
Entretien exclusif de Mac Aficionados avec un serial entrepreneur né qui se bat pour ses idées.
Bonjour, je m'appelle Frank-David Cohen. J'ai 35 ans. C'est un plaisir pour moi de m'adresser à vos lecteurs. Je suis un peu avec le monde Apple comme Obelix avec la potion magique : je suis tombé dedans quand j'étais tout petit!
Mon père a développé le premier logiciel SGBD pour Macintosh en 1984. J'ai passé mon enfance à voir Apple et les macs évoluer, à trainer chaque année à l' Apple Expo où mon père exposait.
"J'étais un Mac Evangelist de la première heure à une époque où nous étions des marginaux. C'est cet amour pour Apple, et cette fascination pour Steve Jobs (sa vision) qui a déterminé mon choix de carrière."
En 2003 je sors de Dauphine avec un diplôme d'ingénieur et monte ma première boite.
Nous proposions une solution de CMS ( Content Management System) pour permettre aux petites entreprises de gérer de manière autonome leur site Internet à une époque où il fallait passer par des agences web aux coûts rédhibitoires pour les PME).
En 2008, constatant les difficultés pour rencontrer des investisseurs quand on est entrepreneur en France, je lève 300k€ auprès de 2 business angels ( investisseurs financiers) et lance FaisonsAffaire.com, l'une des premières plateformes de crowdfunding (financement).
Malheureusement, nous sommes là un peu trop tôt sur ce marché.
Nous déposons le bilan en 2010. En 2011, je monte avec le producteur Thomas Langmann (Oscar du meilleur film en 2012 pour " The Artist ") AboutMyStar, une agence de gestion d'image digitale pour les célébrités misant sur une monétisation de leurs communautés et de leur image, partagée avec les talents.
En 2014, je parviens à convaincre Damien Rottemberg, un ancien camarade de Dauphine et l'un de mes plus vieux amis, de me rejoindre dans une nouvelle aventure : Room.
(Comment l'idée vous est venue? Quels étaient les objectifs recherchés)
Comme la plupart d'entre nous, je suis un utilisateur de Facebook depuis de nombreuses années.
J'ai pu voir et constater les évolutions des mœurs sur le réseau social et j'ai fait un constat très simple : l'époque où nous partagions tout avec tout le monde est derrière nous.
Aujourd'hui, mon feed Facebook ne contient plus les photos de vacances de mes amis ou les statuts illustrant leurs humeurs mais essentiellement les articles d'informations qu'ils partagent.
Nos " amis " Facebook ne sont plus que nos amis mais un mélange de collègues de travail, d'amis, de famille, de vagues connaissances. Il y a donc à présent une réelle appréhension avant de poster quoi que ce soit. Finalement, Facebook n'est plus à l'image de la réalité.
"Dans la vraie vie, nous fréquentons plusieurs communautés : sa famille, ses différents groupes d'amis, les gens qui partagent une passion commune, etc."
Nous n'agissons pas de la même manière avec ces différentes communautés. (Je ne suis pas le même à un diner en famille et à une soirée arrosée avec mes amis !).
Room reprend cette logique. Dans notre app, nous ne nous exposons pas à un groupe " d'amis " comme sur Facebook mais nous sommes membres de plusieurs communautés segmentées et hermétiquement séparées les unes des autres.
Chaque communauté se rassemble dans un mini réseau social indépendant que nous appelons une " Room ". Ainsi si je fais parti d'un groupe politique engagé, mes collègues de travail n'ont pas à le savoir.
Ce plaisir que nous avons eu de communiquer et de partager n'a pas disparu, seulement Facebook ne permet plus aujourd'hui de le faire librement.
Room est un réseau social où nous retrouvons cette liberté de communiquer. C'est la vision que nous avons du réseau social de demain.
Et il semblerait d'ailleurs que nous ne soyons pas les seuls puisque Facebook a lancé 1 mois après nous une application similaires qu'ils ont baptisé RoomS !
" Nous avons créé Room en mars 2014 et réalisé une levée de fonds seed en 3 semaines. Nous comptons parmi nos actionnaires notamment Jean-David Blanc, le fondateur d'Allociné, ou dans un autre registre DJ Sub Zero. "
Nous sommes - avec mon associé Damien - les deux seuls opérationnels. Nous avons eu 6 mois de développement. Notre application est sortie en septembre 2014. Nous avons travaillé ensemble sur la conception.
Damien, qui est CTO, s'est chargé du codage. Nous avons également travaillé avec des freelance.
Notre stratégie était de lancer l'application sans trop en parler à la presse dans un premier temps, pour s'assurer du bon fonctionnement de l'app et de la résistance de nos serveurs.
Cette première phase devait également nous permettre d'ajuster l' app après les premiers retours utilisateurs. Très rapidement (5 semaines après le lancement de notre app), nous avons été perturbés par une crise : Le lancement par Facebook d'une application similaire qui s'appelle... RoomS.
5. Selon vos propos, le géant Facebook vous a "assassiné en (vous) copiant". Pourtant, vous aviez une politique de confidentialité très claire..."Dans un premier temps ça a été un choc."
Quand vous travaillez pendant des mois sur Room à raison de 20h par jour. Que vous n'avez que le mot " Room " à la bouche, que c'est omniprésent et même obsessionnel et que vous lisez dans la presse (sur Techcrunch) que Facebook lance Rooms et qu'en plus c'est la même application, il faut un moment pour réaliser ce qui se passe.
Nos premières démarches ont donc été de déterminer la meilleure stratégie pour nous défendre et ce que nous voulions pour la suite.
6. On comprend qu'il semble bien difficile de faire valoir une idée ou un produit "virtuel", même sur l'App Store, au vu des nombreuses copies d'apps- le modèle de Flappy Birds). Mais copier une app est plutôt facile...Qu'en pensez-vous?D'une manière générale, c'est effectivement très facile de copier une app.
Que ce soit sur iOS ou Android.
"Vous ne pouvez pas protéger un concept ou une idée, donc le jour où votre application est publique il faut se préparer à l'idée que quelqu'un d'autre puisse décider de faire la même ou de s'en inspirer."
Ça n'est pas pour autant que tout est permis. On ne peut pas protéger un concept mais on peut protéger une marque.
Il est incontestable que les téléphones Galaxy ressemblent énormément aux iPhone. Copie ou pas, Samsung a néanmoins eu la bonne idée de ne pas appeler son Galaxy : iPhone.
Facebook n'a pas eu la même considération à notre égard bien que notre marque soit déposée.
7. Avez-vous cherché à négocier avec Facebook? Pourquoi (ou pourquoi pas)?Je ne peux malheureusement pas répondre à cette question.
8.Room est très prometteuse. Quel était son état avant le plagiat de Facebook ?La polémique liée à l' app de Facebook n'a pas réellement changé nos statistiques. Nous avons certes connu un pic les 2 ou 3 premiers jours où les journalistes en ont parlé mais nous avons vite retrouvé notre courbe de croissance normale.
Ces premiers mois de lancement de Room ont été enrichissants pour nous.
Nous avons été très attentifs aux utilisateurs, à leurs besoins, à leur comportement au sein de l' app et nous avons aujourd'hui une idée très précise de la manière dont notre application doit chercher à s'imposer.
Un entrepreneur doit s'habituer à prendre des coups. Rien n'est jamais facile, et la plupart du temps les choses ne se passent pas comme prévu. Il ne faut jamais se laisser abattre et faire preuve d'imagination.
Je ne peux pas encore tout dire sur la suite.Vous comprendrez que je sois prudent à présent.
Mais ce que je peux vous dire c'est que la suite de l'histoire sera sur iPhone et Android