Si les entreprises du monde de la finance se multiplient depuis deux ans, leur développement est loin d’être égal partout dans le monde. Mais du côté des pays en voie de développement, l’Afrique se démarque.
Très peu mentionnée par les experts de l’innovation bancaire, l’Afrique ne serait pas en retard dans le domaine. Au contraire, les projets dans le domaine se multiplient : L’Atelier avait ainsi déjà évoqué la start-up nigérianne Cube qui facilite le paiement mobile ou de la banque Wizzit une des premières à investir le téléphone portable. D’ailleurs, à écouter les intervenants de la table ronde organisée par Octo Technology lors du Fintech day, le 25 mars dernier, on comprenait immédiatement que le monde des start-up de la finance était sujet à d’immenses disparités selon les régions. Mais au delà du développement plusieurs soulignent à quel point les approches (en terme de législation, de secteurs investis, voire même de mentalité) divergent d’une région à une autre. « Il y a des endroits plus favorables que d’autres au développement des fintechs » résume Sylvain Fagnent. L’Afrique et plus généralement les pays en développement auraient ainsi leur carte à jouer.
Asie et Afrique, des continents sans fintechs ?
Pour Sylvain Fagnent, consultant chez Octo Technology et co-auteur du livre Les fintechs cannibalisent la banque : les start-up africaines de la finance sont en effet nombreuses mais elles répondent à des besoins spécifiques. « Les fintechs là-bas évoluent dans un champ de contrainte. Elles sont donc peu exportables. » nous explique t-il à propos du continent africain. Ainsi, des solutions qui répondent soit au besoin de transférer des fonds pour la diaspora soit à l’utilisation croissante du smartphone d’un continent dans lequel le réseau des agences bancaires est loin de répondre aux attentes des habitants.
Comme l’Afrique, l’Asie était quasiment absente des discussions du Fintech day. Seul le chinois Alibaba s’est vu mentionné par les intervenants. Une absence que Sylvain Fagnent explique par la différence culturelles : « Les usages sont différents. Les Asiatiques sont hyper-connectés donc cela change l’approche. Je pensais d’ailleurs que cela bougeait beaucoup dans le domaine mais paradoxalement non, on trouve peu de fintechs en Asie. Il y a un an le sommet Finnovate Asia avait même dû être arrêté faute de participants. » Et si l’on jette un œil aux chiffres fournis de l’expert en finance, Chris Skinner, plusieurs fois cité par les intervenants du Fintech day : en terme de nombre de fintechs et d’investissement, viennent d’abord les États-Unis, puis l’Europe. L’Asie apparaît loin derrière, pour le moment en tout cas puisque d’aucun prédisent une arrivée massive de start-up de la finance dans les prochaines années.
Europe et États-Unis, deux visions des fintechs
Bien plus en avance que l’Afrique semble-t-il dans le domaine, les deux régions n’en souffrent pas moins de grandes disparités. Nombreux sont les participants du Fintech day à l’avoir souligné. Grégory Gillet de Strands parle à L’Atelier de « différence de mentalité ». Cette jeune entreprise de services financiers est basée à la fois dans la Silicon Valley et en Europe, elle fait donc l’expérience des deux continents et le constat est clair pour Grégory Gillet : « On communique énormément sur la sécurité en Europe car c’est ce qui plaît. C’est moins le cas aux États-Unis ». Il souligne également à quel point la législation est plus favorable côté américain à l’apparition des fintechs même si in fine les utilisateurs sont moins protégés selon son collègue, Marc Torrens. Ce dernier met en lumière un autre point : les Américains sont plus habitués à faire de l’hébergement sur le cloud, une ouverture qui créerait plus de possibilités.
Autre disparité constatée par les différents acteurs de la finance présents au Fintech day : au sein même de l’Europe les approches sont différentes. Loin devant, le Royaume-Uni est décidément la destination privilégiée des start-up de la finance. Sylvain Fagnent note ainsi que le territoire britannique comptait, en 2014, 60 % des fintechs d’Europe. Mais l’analyste d’Octo Technology comme d’autres insiste sur un point : tout cela est en train de changer. D’ailleurs pour Benoît Bazzocchi de SmartAngels, dans ce monde de la finance en pleine transformation, « ne survivront pas toutes les fintechs mais ne survivront pas non plus toutes les banques ».