Bientôt la fin des grandes vacances pour Marie et ses deux enfants. Voulant consacrer sa dernière journée au rangement du chalet pyrénéen qu’elle loue depuis plusieurs semaines, cette prof de français dans un collège parisien confie Théo et Jules à un couple d’amis. Le soir venu, un terrible orage éclate, suivi d’un violent tremblement de terre. En plein chaos, coupée de toutes formes de communication, Marie part à la recherche de ses fils. Après les avoir récupérés sains et saufs, elle tenter de rejoindre la ville la plus proche. Mais les dégâts sont tels que la jeune femme se retrouve piégée avec des centaines d’autres rescapés dans une vallée d’où il semble désormais impossible de s’échapper. Commence alors un huis clos à ciel ouvert où les tensions, exacerbées par le manque d’informations et de nourriture, vont peu à peu faire basculer la communauté dans une incontrôlable violence.
Un récit post-apocalyptique au cœur des Pyrénées, entre Bagnères-de-Luchon et le col de Peyresourde (pour ceux qui connaissent…). Jean-Christophe Chauzy imagine la transformation psychologique d’une femme confrontée à une catastrophe naturelle aussi inattendue que dévastatrice. Il décrit le réflexe de survie, le retour aux instincts grégaires. Il peint une humanité réinventée ou le moteur de l’existence est uniquement régi par la nécessité de subvenir à ses besoins primaires. Quand la situation sanitaire devient invivable, l’individualisme et la force brute prennent le pas sur toute autre considération. Face à l’adversité, Marie et ses enfants, au diapason de leurs congénères, révèlent leur part de sauvagerie, d’esprit de meute.
Les dessins sont sublimes, les paysages grandioses et dévastés s’étendent parfois sur des double-pages donnant le vertige où l’on découvre la montagne éventrée et les torrents en furie. Il a fallu un an et demi au dessinateur pour réaliser les 110 planches mais quand on voit le résultat, on se dit qu’il a bien fait de prendre son temps.
Un album somptueux, totalement glaçant, qui interroge profondément sur la nature humaine et la façon dont nous-mêmes réagirions dans une telle situation.
PS : ce premier tome se termine au moment où Marie s’apprête à découvrir ce qu’est devenu le reste du monde après le cataclysme. Autant vous dire que j’attends la suite avec la plus grande impatience !
Le reste du monde T1 de Jean-Christophe Chauzy. Casterman, 2015. 110 pages. 18,00 euros.